mardi 31 août 2010

292 : lundi 30 août 2010

Dans ma chute, j’écoutai le chant joyeux des arbres, béats et glougloutant : « SEC ! Voilà ton nom, ô poussière. Et sans fin, sous nos pieds baobabs, tu pourriras. Et tes os nous seront nos racines nouvelles. Nos bois vierges des tiens enfin débarrassés monteront parcourir des cieux que tu ignores. Tu n’es rien, oublie-toi et passe sans tracer ». Pétrifiées sur papier mur, tes peurs d’enfant lucide ; la fleur fanée de tes vies impossibles et la courre éternelle d’une mort en livrée ; l’amour impasse de tes jours consumés et les tristes rangées de hêtres espérant. Et il en veut encore ! C'est bien. Donnez-lui donc du laid, à boire à la cuillère. Cloîtré dans ton Eden pastel, écoute tes vieux maîtres ! Continue d’imiter tes compagnons félins, ces dieux de dieux poilus qui t’apprennent à croire. Penche-toi, l’échiné, car tu es ce qui aspire, tu es ce qui lampe, tu es l’absorbé des mondes à finir ; si fiers, les tigres nains, matous sempiternels, t’enseignent à parler leur langue d’entrechat. Pantin de leurs mots tendres et la bouche en sourire, tu chéris ces félidieux, les Enivrés d’eux-mêmes...Terminé. En royaume d’enfance tu ne reviendras plus, ta bave est transférée. Mais tu n’as rien perdu, car si tout se finit c'est que c'est commencé.


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C’était raconter son week-end, se faire raconter les week-end des autres, c’était s’y croire encore un peu, en week-end, jusqu’à dix heures, dix heures vingt et, café en main, se disperser, chacun à son poste de travail, dans l’engourdissant ronron des machines.


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J’étais, bien sûr, prêt à aller jusqu’au bout. Ou disons que, cette fois au moins, j’étais prêt à aller au bout, jusqu’au bout. Jusqu’au bout pour que ce ne soit pas possible, parce que là, on n’en peut plus, trop c’est trop. A un moment, il faut dire stop, il faut dire ça suffit, ça dépasse les bornes, ce n’est plus tolérable, nous sommes arrivés à un point de non retour, on marche sur la tête. Et quand on marche sur la tête, il faut chacun, en son âme et conscience, être prêt à aller jusqu’au bout. Voilà, c’est dit. Attention, ça ne rigole plus, je vois déjà les sourires se crisper et le rire des moqueurs tourner au jaune. Parce qu’aller jusqu’au bout, c’est qu’on parle de choses qui ne sont pas de la rigolade, pas de la gnognotte. Jusqu’au bout c’est loin. D’ailleurs, je n’y suis jamais allé, c’est dire. Si c’est loin. Jusqu’au bout, ça pourrait même être là, par exemple, tout de suite là exactement. Ça y est, là, tel que vous me voyez, là où je me trouve, je suis allé jusqu’au bout. Ah, ça vous étonne ?! Vous ne vous y attendiez pas à ce qu’il soit là, le bout ? Hé bien si, c’était là, et vous le voyez comme moi. Le bout. J’y suis. Ne me dites pas que je ne vous avais pas prévenu, parce je vous l’avais bien dit que j’étais prêt à y aller, ce n’était pas du bluff. J’ai même été capable de revenir sur mes pas pour aller jusqu’au bout, parce que je n’ai peur de rien, moi, quand la situation, comme ça, elle devient insupportable, quand on en est là. Quand on en est à un tel point qu’alors, hé bien, comment dire ?, quand alors on ira jusqu’au bout pour que, hein. Oui voilà, c’est exactement ceci que je voulais dire. Ce que je voulais dire, c’est que là, au point où on en est, je suis prêt à aller jusqu’au bout. Je pense que c’est clair, et y compris si le bout, c’est exactement là où je me trouve déjà.


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Des visiteurs sont arrivés – les adolescents ont amené des transats, des fauteuils, et comme il n'y en avait pas tout à fait assez, j'ai pu, après échanges de sourires, de noms, de poignées de mains – ils étaient poignées de mains – m'asseoir dans l'herbe, proche, mais un peu à distance, ainsi, ce qui convenait puisque rapidement la conversation a abordé des histoires de gens que je ne connaissais pas, des thèmes qui m'étaient étrangers, ou sur lesquels il était, avec évidence, préférable que je garde le silence. J'en suis restée à un sourire vague, léger, voltigeant, et à une surdité distraite quand par politesse mon avis était demandé. Je regardais la couronne d'arbres, conifères presque silencieux, micocoulier et fruitiers dont j'écoutais le très léger discours dans un filet de brise.


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Ils n'ont pas su comment lui dire. Ce n'est jamais simple de lui parler, même pour lui dire des choses anodines; ses réactions peuvent être démesurées ou inexistantes, violentes ou lamentables; on n'est pas toujours sûr qu'elle ait compris un traître mot prononcé. Certains s'attendaient sans doute à ce que Jean-Jacques lui dise, mais Jean-Jacques ne lui a pas dit, Jean-Jacques ne l'a même pas approchée, en vérité il semblait chercher à l'éviter à tout prix. Il ne fallait pas compter sur Marguerite, pas douée elle non plus pour le dialogue, pour le renouer avec sa sœur avec qui elle ne communiquait plus que par cartes postales épisodiques depuis plusieurs années. Les autres n'ont pas voulu prendre cette responsabilité, la peur de mal faire, d'en subir les reproches, longtemps après. Elle repart; elle rentre chez elle, ils n'ont pas su comment lui dire, elle ne sait pas, elle ne saura peut-être jamais ; comprendrait-elle ?