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Une rue pavée la nuit, des maisons à colombages et des immeubles du dix-huitième siècle. Les lampadaires éclairent faiblement, la bruine bretonne épaissit l’air. Je rentre chez moi, un peu ivre, un peu triste. J’aimerais pouvoir me convaincre que je ne l’ai pas croisée à l’instant, et que je ne viens pas d’être odieux avec elle à cette occasion. Je crois n’avoir croisé personne, j’en voudrais des preuves, je ne comprends pas celles et ceux qui assimilent leur ignorance à l’idée qu’il n’y aurait rien a connaître. J’ai pu oublier, s’il est possible que l’immonde surgisse de soi dans une déflagration, n’est-il pas possible également qu’il soit aussitôt recouvert d’un oubli opaque et fulgurant. Peut-être que rien de tout ceci ne peut exister, ni le surgissement de l’immonde, ni son oubli instantané. Je ne sais pas, je sais par contre qu’en faisant dialoguer sans fin quelques idées fixes et contradictoires, on peut finir par toutes leur donner raison, quel que soit leur degré d’absurdité. Je ne pourrai rien me prouver, la rue déserte ne m’apprendra rien à ce sujet, je dois rentrer chez moi. J’espère que les limaces géantes ne m’y auront pas précédé et que je pourrai fermer l’œil, dormir, et que ma chambre ne sera pas envahie par un banc de crabes pendant la nuit.