mercredi 11 août 2010

272 : mardi 10 août 2010

C'était garder le casque au bureau, derrière l'écran, et avoir posé la tour de l'ordinateur sur le bureau, côté couloir, près de l’écran, rempart naturel contre les assaillants du jour.


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Je n’irai pas caresser la peau douce et la blondeur des îles qui n’existent hors de mes espoirs déraisonnables et de mes rêves fous. La cruauté est celle-ci que nos rêves les plus chers ne sont de ce monde qu’à l’état de rêves quand nous les voudrions de chair et d’espace habitable. Ce sont les promesses que nous crûmes entendre, celles qui dirent sans personne que nous vivrions nos vies sans avoir à les vivre, et ayant cru les entendre, nous les entendîmes et les crûmes. Je les rencontrai parfois à l’état de veille, ou du moins mon esprit et mon corps s’accordèrent à les reconnaître et m’en convainquirent. Leur insoutenabilité confirma leur valeur de rêve et de promesse, elle valida leur existence. Aussi disconvient-il de les priver de notre désir.


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Passer des heures, des jours, cloué entre ces murs, pour labeur obligé ou choisi – entendre des nouvelles du monde – pour ne pas se noyer dans désespérance, ou colère, ou joies illusoires, les laisser glisser, se concentrer sur sa tâche – et puis, brusquement, en levant les yeux, un soir, voir la lumière par une fenêtre ou une brèche, et la gloire simple d'une herbe qui se dore dans les rayons mourants – sentir la vie.


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On n'avait pas pu déterminer leur provenance exacte. Un matin, on en avait trouvé deux, à quelques dizaines de mètres l'une de l'autre. Le lendemain, la plage en était pleine. Il en était venu suffisamment lors de cette deuxième nuit pour recouvrir entièrement l'étendue de sable entre les deux jetées, du bord écumant des vagues jusqu'au remblai. Leur nombre et leur concentration rendaient leur odeur écœurante, difficilement supportable pour les employés de la commune qui furent chargés d’en nettoyer la plage. A l’aide de tractopelles, ils entreprirent de les déverser dans de grandes remorques qu’on allait vider dans un grand terrain vague à l’autre bout de la ville. À la tombée de la nuit, ils n’avaient pas dégagé un dixième de la zone. Le troisième jour, elles s’étaient accumulées sur la même surface, mais sur plusieurs mètres de hauteur. On abandonna dès lors le dérisoire travail commencé la veille. On établit un périmètre de sécurité autour de la plage, et les bâtiments du front de mer furent évacués, bien qu’aucun danger précis ne semblât en menacer les habitants. Le problème embarrassait les autorités qui n’y trouvaient pas de réponse appropriée. C’est un stagiaire de la mairie qui, ayant mené quelques recherches, leur rapporta qu’un phénomène de même nature était survenu sur le littoral du Nouveau-Brunswick, une dizaine d’années auparavant.