dimanche 29 août 2010

290 : samedi 28 août 2010

Boiseries sombres, brocards amortis, et ces silhouettes qui circulent, échangent, verre en main, ou non, la marqueterie des visages, aux sourires affichés, grands et vides, et les mots qui les accompagnent s'évaporent, aux sourires brefs, serrés, pointus, accompagnant des remarques, pensées de belle tenue, de belle érudition, ou des rapprochements qui se veulent et sont parfois insolites, visages échappés de bustes de penseurs, ou lettrés, ou politiques, et les mots qui sont prononcés, rares, tombent comme des sentences, acceptés avec gratitude, et résistent parfois à la réflexion, quelques rires brutaux qui fusent, venant des êtres les plus sombres – et toi au milieu, fin, si jeune, ou simplement naïf, ou le paraissant, et tu te penses invisible, tu le veux, pour cueillir ce qu'ils t'offrent là, mais ta verdeur est un pavillon, ta fraîcheur une note qui tranche, et tous ont conscience de ta présence, et certains, les meilleurs, peut-être, ont un petit regret, presque un remords en pensant à leur jeunesse, il y a si longtemps.


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En suivant les rues parcourues cent fois, je croise d’autres voies occultées, bien qu’elles aussi et immanquablement traversées cent fois, cent fois croisées en ces points des trajets usuels. Des zones sombres se délimitent, dont on avait oublié l’existence malgré la proximité fréquente, à la place desquelles on imaginait une distance homogène et indifférente, le prolongement atténué des parcours nettement retenus par la mémoire. On se gardera d’en faire des centres, des points de départs évidents et des repères clairs, car on y perdrait les confins et les possibilités d’effleurements inquiets et maladroits, les possibilités de jaillissements de pensées insoupçonnées et issues d’un ailleurs en soi, celles qu’on avait vu nous traverser alors qu’on s’était aventuré là-bas par accident.