Minima moralia (2/3) Ils émirent l’hypothèse d’un cas concret et localisé. S’il était possible, à supposer que ce le soit, de tuer quelqu’un sans qu’il en souffre physiquement et moralement, sans qu’il s’en rende compte, et que ce décès ne choquait ni ne causait de peine à personne, pas de préjudice non plus, serait-ce là une mauvaise action ? Ils se dirent qu’ils ne le trouvaient pas, que dans ce cas, selon eux, cette action n’était ni bonne ni mauvaise, parce que dans ce cas, la seule personne qui subissait un préjudice n’existait plus, et que le préjudice qui n’existait qu’en elle disparaissait avec elle. Ils conclurent que cette action ne serait mauvaise que du point de vue d’un principe moral, c’est à dire du point de vue de rien.