dimanche 5 septembre 2010

297 : samedi 4 septembre 2010

Il s’était assoupi, dos au mur, la chemise ouverte, dans la chaleur tressée de l’après-midi. Simple et beau, dans son abandon. Le savait-il, seulement ? L’autre le regardait, debout, entre des pans de lumière et l’improvisation d’un joueur de guitare. Depuis le cou jusqu’à l’orée du ventre, il fit glisser, lentement, le pinceau fin de son imagination. Dans son sommeil, le garçon prenait des poses. La poussière était douce, le désir un peu trop fort. Il reprit son chemin à travers la ville ancienne. Le garçon dormait encore. Faisait-il semblant ? Sur son corps passa l’ombre d’un doute. Sur ses lèvres, un sourire. Léger...


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Quand le bateau a quitté le port, son tourment s’est apaisé un peu. Il regardait les immeubles du front de mer s’éloigner et découvrir au fur et à mesure qu’ils rapetissaient les hauteurs de la ville derrière eux, puis il vit plus largement la côte dans la lumière du matin, en pensant bien, un peu trop délibérément, que c’était la dernière chose qu’il verrait jamais de son pays, sauf si les choses tournaient mal pour lui, et que les autorités policières de là où il se rendait lui mettait le grappin dessus. Dans ce cas, il reverrait certainement son pays, et de l’intérieur ses équipements judiciaires et pénitentiaires. Il faudrait déjà qu’on comprenne sur les lieux qu’il laissait que le coupable était lui. Peut-être était-ce déjà le cas maintenant qu’il partait, peut-être retracerait-on son trajet depuis les faits jusqu’à sa traversée à valeur d’aveu, et qu’on l’intercepterait pour l’extrader dès sa descente du bateau. Cent autres façons de mal tourner étaient possibles pour ses affaires là où il allait, mais dans l’incapacité qu’il était d’esquisser les contours de ces mauvaises fortunes potentielles, il ne les envisagea pas alors. Il les connaîtrait bien assez tôt, si d’aventure elles se présentaient à lui.


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Giselle II. Résumé de l’ellipse. Albrecht, galant Duc de Silésie, tombé par la belle à l’épisode précédent, a proposé à Giselle de tirer son eau de puits pour elle. Mais après avoir remonté le seau du trou, Duc Albrecht le lui a malheureusement renversé dessus, mouillant bienencontreusement sa chemise de nuit, déjà pas bien couvrante... Épisode du jour. Tirant sur sa chemise, mouillée pendant la scène susévoquée [geste presqu’innocent ayant pour effet notoire de favoriser une certaine transparence dont Albrecht, gourmet visuel, s’attache à saisir toute la profondeur], Giselle ne peut s’empêcher de zyeuter aussi du côté du goujat dandinant. Car Albrecht, pendant ce temps, réitère l’opération du seau, les fesses en balancement. Il récupère enfin le deuxième essai sorti du puits et entreprend, bouche en sourire, son retour triomphe vers la translucide [qui, de son côté, minaude encor : seins tordillant lourd sous l’œil capté d’Albrecht aux longues envies ; battement colibri de cils mignon et regard jésuitique feignant d’ignorer l’oeil lascif de l’inconnu Gisellophile, posé insistamment sur son joli sein droit, qui a pour lui, il est vrai, un petit surplus de beauté, un surcroît non négligeable de sensualité qui en fait une proie de premier choix pour le connaisseur, pour l’exigeant. Oui, une gravité particulière et insistante, pointant haut mais arrondi quand même par la pesanteur charnelle, qui fait de ce beau rotond droit un aimant à regard ! De plus, l’humidification accidentelle de la chemise susdite est particulièrement prononcée à cet endroit précis, ce qui facilite évidemment la désirabilité du dextre rebondi. En substance, Albrecht est conquis par ce consolant droit, un monde parfait. Du coup, le gars mélo gaga se jette sur ses genoux, renversant du même coup la moitié du seau 2. Mais cet ouragan de seau semble étrangement du plus bel effet sur l’émoi de Giselle, si l’on en juge par le sourire coquin qu’elle esquisse discrètement à petits coups de langue sur sa commissure droite. Elle nous trame quelque chose, je vous dis. Là, tenez, voilà ! Reculante, elle bondit sur la margelle du puits et se met à tourner, et tourne, et tourne, et tourne pour l’envie, Albrecht la regardant penaud au bord du puits. Mais Albrecht, car Duc, bientôt se ressaisit, il sait que pour son coup va falloir jouer fin. Heureusement que Wilfrid, son domestique, lui sert aussi, à l’occasion, de maître de ballet et qu’il lui a appris quelques pas du Bongoût. Remémorance rapide [pendant ce temps deux tours de l’Astre rayonnante] et voici qu’Albrecht entreprend sa parade. Pan paon léger sans plume, il roue en avançant : pied droit, posé, puis l’autre, demi-tour, mouvement du bassin, retour eeeet saut, réception, tour complet, pause, révérence, et reprend la ballade : pied droit, posé, puis l’autre, demi-tour, mouvement du bassin, retour eeeet saute, réception, tour complet, pause, révérence. Gagné deux pas. Reprend, encor, allez, plus haut le menton. Voilà, voilà : trois pas. Arabesque ? Ok, allez, tranquille, sans forcer. Haut le menton, le pied tendu tendu tendu, tendus aussi les doigts, oui, repose, voilà, salut. Elle tourne, elle tourne, elle saute, réception-position bras. Face-à-face tendu des deux danseurs émus. Je touche ? Je touche pas ? Allez, elle prend sa main. Lever-ciel diagonale-est, demitournée main sur la taille, tour entier de girouette, lui avance doucement, contact fesse - bas ventre, réponse-réaction : lâcher-main, petit saut en avant, décolle les talons, tour mains jointes pointes…pointes…pointes…pointes…pointes…pointes…pointes, retour position regard sourire salut. Albrecht avance un pied, puis l’autre, demi-tour, mouvement du bassin, retour eeeet saut, réception, tour complet, pause, révérence. Tendre le bras vers taille, ô douce ! Giselle immobile regarde le galant, écartement des bras, les mains légères, battement, révérence arrière, recul recul, pas de côté pas de côté, demi-tour, départ course eeet saut réception-margelle et aaaaaaa-rabesque. Voilà, superbe, parfaite, reprend ta position and now le big final : préparation triple axel avant rattrapage bras musclés éééééééééééé…HOP ! Albrecht s’était avancé : bien vu ! Il rattrape l’agile dans ses bras, la pose, bascule quart de tour demipause, et baiser. Smouic. Et rebaisééééééhounnnnnn/ ahh /hounnn-lèvre-hou…nnnn/aaaaah-hounnsmouic-supérieure-lèvre-supérieuremmmhounasmouic, langueumlllllahounnnlll langue-tournoyante, et main-taille serrée, plus fort, roulée-pince-serre, encor, languelllalalalanhounnngue réponses parfaites de la belle, haleine de pêche, Giselle est faite. Amour-flash dansé dans ces bras-langues entorsadés d’é-CLAIRS ! Rideau.