lundi 31 mai 2010

200 : dimanche 30 mai 2010

"Je vous écris d'un pays lointain" (16) D’abord, grand merci pour le mot « correspondance ». Depuis que l’avoir lu dans votre lettre d’avant, il tourne et roule dedans ma tête. Là quelque chose que j’y cherche sans bien savoir. Quand trouvé, un pas vers l’avant je devine. Non qu’envie d’aller bien loin, mais si seulement plus léger le vertige d’aller debout. Ce que vous me dites du « cor » et de l’avec me touche beaucoup, et m’égratigne aussi. J’ai souvent la vue d’un puzzle et me fait mal. Pas que des pièces en moins, mais trop de rugueux déposé sur les bords. Je crois que croûte, je pourrais traduire, mais aussi corne, dedans dictionnaire langue vôtre. Pour ça aussi, un seul mot ici. Pourquoi je ne sais pas. Peut-être moins besoin de distinguer ce qui de défense ou de douleur. Mais revenir à « correspondance » si beau ! Qu’ainsi, dans les fragments croisés, on fasse dessins d’ombres mutuelles est énigme qui m’assoit. Continuons, si vous me l’accordez. Bien à vous, …

------------------

Au-delà de ce seuil, le corps du marcheur se dissous. Il faut alors au marcheur traverser tout l'espace couvert jusqu'à la sortie pour retrouver son corps. La traversée étant quasiment impossible sans corps, le problème est le suivant : il faudrait ne pas avoir perdu son corps pour pouvoir le retrouver. À la sortie se reforment parfois des corps de marcheurs, qui souvent s'étaient dissous à travers le seuil plusieurs mois plus tôt. Leurs corps reformés sont parfois entiers, parfois ils ne le sont pas. Un mouvement dont ils ne peuvent témoigner, faute de corps pour y avoir assisté ou pour le retenir, s'est opéré sous l'espace couvert, qui les a transportés entiers ou en parties depuis le seuil jusqu'à la sortie.

------------------

La pièce était déserte, silencieuse, blanche, haute, propre, mate, nue et pourvue d'un escalier en haut duquel apparût bientôt Armelle. Semblant profondément tourmentée et toute entière déterminée à empêcher quelque chose, elle fût en bas des marches en un instant. Je m'apprêtais à balbutier quelques mots pour lui expliquer ma présence quand elle me ceintura d'un bras dont je n'avais jamais soupçonné la vigueur, et me signifia la nécessité impérieuse de me taire par une main vigoureusement pressée contre ma bouche. J'étais tout à la fois terrorisé par la violence de ses gestes, étourdi par tout ce qui m'était révélé sur elle, et enflammé par ce corps-à-corps, qui finissait de me convaincre que tout ce que j'avais vécu avec elle avant ce jour n'avait été qu'un avant-goût édulcoré de ce que cela aurait pu, de ce que cela aurait dû être.