vendredi 25 juin 2010

225 : jeudi 24 juin 2010

On ne lisait plus que des messages informatifs, plus rien d'autre. Hormis quelques personnes qui lisaient encore un peu de la littérature du patrimoine. Il n'était pas cependant interdit d'écrire, et d'ailleurs la plupart des personnes qui lisaient encore écrivaient aussi. L'existence d'une activité littéraire contemporaine était connue, elle était même traitée - encadrée et conservée. Aucun texte n'était accessible pendant les cent premières années qui suivaient son écriture. Avant ce délai, seul son auteur en avait connaissance. Les nouveaux textes étaient expédiés par les écrivains eux-mêmes à la Bibliothèque des Lettres Contemporaines, ils portaient sur l'emballage un code spécifique permettant leur classement par les machines de la bibliothèque, qui réceptionnaient et emmagasinaient.

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Elle avait oublié. Complètement oublié. Pourtant elle savait combien il était susceptible sur ce point. Combien cela participait de sa confiance en lui que chacun se souvienne de l’évènement. Aussi l’avait-elle depuis longtemps inscrit sur son calepin, à la bonne date, souligné de rouge ; et régulièrement elle tombait dessus et se le remémorait, feuilletant les pages à la recherche d’un autre rendez-vous. Elle y avait repensé la veille et déterminé le moment auquel elle devrait appeler : pas trop tôt, pour ne pas avoir l’air de se débarrasser d’une corvée, mais pas après midi non plus, comme si elle s’y prenait au dernier moment. A présent, il était minuit dix, la journée s’était écoulée et elle avait finalement oublié ; comment expliquer cet acte manqué ? Et impossible à cette heure de se ruer sur le téléphone pour rattraper encore la bourde, au moyen d’excuses désordonnées et confuses. Il lui faudrait attendre le matin, pour appeler et essayer de ne pas entendre le ton contraint de ses dénégations lui disant que cela n’avait pas d’importance. Alors que le mal était fait.