On voudrait déjà savoir la date à partir de laquelle nous connaissons aujourd'hui et à l'année près, pour chaque année au moins un événement datable. On voudrait ensuite connaître une façon plus simple et plus claire d'exprimer l'idée présentée par la phrase précédente. Alors nous disposerions de meilleures bases pour commencer l'écriture d'un livre qui réunirait des courts textes de cinq lignes chacun, tous commençant par une phrase plantant comme cadre et décor dates et lieux, "À Naples en 1376", "À Aurillac en 998", "Dans un faubourg d'Anvers en 1837", "Quelque part dans la Thébaïde en 247", "Sur les rives du Tigre près de Ninive en 2512 avant notre ère". Cinq lignes de texte par année depuis que nous pouvons à l'année près dater un événement pour chaque an, un événement au moins connu par an mais un seul texte pour chacun d'entre eux, un texte de cinq lignes. Attribuons à un livre la possibilité d'accueillir trente lignes par page, si deux lignes sont sautées entre chaque paragraphe, une page pourra en accueillir quatre, ce sont vingt cinq pages par siècle et deux-cent-cinquante par millénaire, une épaisseur totale du livre dépendante de l'ampleur de la période embrassée. Imaginons qu'en dépit de toute probabilité sérieuse ce livre soit écrit et paraisse, et que face aux puissants mécanismes que le monde lui opposerait il connaisse un succès suffisant pour paraître en collection de poche, alors il faudrait à ses feuillets être recouverts de plus petits caractères pour faire comprendre au livre le même nombre de pages, ou bien qu'elles ne comprennent plus chacune que trois paragraphes, trente-trois pages environ par siècle et trois-cent-trente-trois par millénaire environ. Imaginons et c'est déjà plus raisonnable que les textes paraissent sur site internet ou blog, au rythme moyen de trois par semaine c'est trente-trois semaines par siècle environ et près de sept ans pour un millénaire, au rythme moyen de quinze textes par semaine moins de sept semaines par siècle, un an et quinze semaines pour un millénaire environ. Un texte par jour et c'est environ trente-trois mois par millénaire, deux ans et neuf mois. On voudrait que le livre dans son ensemble mette en doute la valeur de la notion d'événement lui-même tout en étant intégralement à sa gloire. Ce texte est un paragraphe qui, imprimé en petit caractères et disposé sur trente lignes, pourrait constituer un millième d'un livre de mille textes d'un paragraphe et trente lignes chacun, et chacun présentant l'idée d'un livre programmatique. Un texte par page, le livre ferait mille pages, un texte par jour sur blog, l'intégralité paraîtrait en quatre-vingt-trois mois et dix jours environ.