Pour ce qui est de la question d’exister, les Vivotins restent sur leur quant à soi. Ils croient fermement que chaque clin d’œil masque peut être une fin du monde et qu’un chapeau vu du balcon ne cache pas nécessairement un homme. Quand la vie les interpelle, ils y font volontiers un tour, mais la boudent dès qu’elle les ennuie. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir un Vivotin foudroyé par une crise d’apoplexie dès les premiers échanges d’une conversation jugée trop terne et revenir à lui, une fois le décès constaté, au passage d’une cheville gracile. Naître, vivre et mourir signalent avant tout chez eux des sautes d’humeur. Bien qu’ils n’en revendiquent pas le statut, on peut raisonnablement les considérer comme des intermittents du spectacle.
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Le village n’était jamais resté aussi longtemps en un lieu. Quelque chose comme, une rencontre suivie d’un mariage s’était produit. Chacun savait que cela ne durerait pas la vie entière mais tous goûtaient ce sentiment nouveau. Ils avaient une terre. Elle les écoutait, les visitait souvent, toujours sans violence et leur laissait prendre tout ce dont ils avaient besoin pour continuer à peser doucement sur son corps. Tamel en profitait pour laisser plus souvent le corps à son frère, lequel rattrapait en des ballades sans fin à travers la montagne la fatigue qu’il avait en retard. Il put même s’y consacrer une semaine entière lors de laquelle Tamel disparut totalement. Même Grimace la chatte écaille de tortue à un œil ne percevait plus son odeur. Ces jours là, du lever au coucher du soleil, elle parcourait en tous sens les rues et les places en poussant régulièrement de petits cris qui ressemblaient autant à des plaintes qu’à des appels. Tamel était alors bien loin. Parti dans une de ces échappées qui effrayait tant sa mère autrefois. Du temps où l’enfant, pas encore en âge de parler, ne pouvait lui évoquer ces surfaces étrangement lisses et blanches où lorsqu’il en avait l’occasion, il parvenait à reposer non seulement son être complet, mais aussi, tous les petits génies qui l’habitaient.
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Dans mon rêve, étais assise sur la terre brune d'un chemin, et sous moi s'étendait à l'infini un pré ras, si ras qu'irréel, si étrangement vert qu'il devint, à l'évidence, peu à peu, quand le regardais, unifié, gorgé d'humidité, et puis marais très herbu, étang tâché de rayons de soleil, algues longues mêlées au reflet des feuilles d'arbres hypothétiques, et j'y nageais, eau dont le frissonnement se gelait jusqu'à se faire jade impur, et me suis penchée vers lui – me suis réveillée la joue à la lisière entre l'acajou et le cuir de mon bureau.
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Choisir un coin de ciel pour y poser ses yeux. Choisir un mot le prononcer laisser le temps passer s’en imprégner faire en sorte qu’il ne s’échappe pas de son sens. Choisir un son et voyager dedans. Choisir un rêve le parcourir s’en nourrir le laisser s’effacer. Choisir d’être soi-même et s’y tenir. Choisir un morceau de vie à partager. Choisir un sourire l’emprunter le faire sien. Choisir un geste l’étudier le rendre parfait. Choisir un texte à lire à dire à murmurer à chanter à hurler. Choisir un paysage s’y promener s’y délasser s’y retrouver. Choisir un désir le laisser en suspens le faire grandir s’en délecter. Choisir un arbre se coller à son tronc l’entourer de ses bras faire la paix en soi. Choisir un être aimé l’apaiser le rendre heureux. Choisir une idée la développer l’exprimer la faire vivre. Choisir de ne jamais renoncer. Choisir d’agir avec son cœur. Choisir sa solitude. Choisir son langage. Choisir sa résistance. Choisir de s’endormir sur un sourire. Choisir et respecter ses choix.