lundi 29 novembre 2010

381 : dimanche 28 novembre 2010

Ayant tendance à forcer sur l’apéro du soir, longtemps Léon se coucha de bonne heure.

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Tu marches. Chaque matin, tu marches à travers la ville, tu ne t’arrêtes pas, tu ne regardes pas les passants, tu ne vois rien d’autre que ton corps en train de marcher. Tu te concentres uniquement sur ta marche, à grands pas, tu t’appliques à garder ce rythme, toujours le même, comme une horloge. Au début, ce n’est pas facile. Tes pas sont imprécis, maladroits, ton corps ne suit pas. Ta tête est trop lourde, ton dos te fait mal, tes bras t’encombrent, ton regard s’attarde, ton souffle est trop court. Puis tu te redresses, tu fixes un point, loin devant toi, toujours plus loin. Tu marches, tu te sens plus léger, la respiration se calme, tu sens l’air entrer, ressortir par tes narines, tu sens tes muscles s’activer, tes pas qui s’affirment. Petit à petit, ta tête s’allège, se vide. Il n’y a plus d’effort, ton corps t’emmène, il t’apprivoise, tu lâches prise, tu te sens libre, tu marches, tu marches jusqu’à ce que toute pensée cesse, tu es corps, tu fais corps avec toi-même, tu n’es plus à contre-courant, tu marches, tu marches à la rencontre du temps.