samedi 9 octobre 2010

331 : vendredi 8 octobre 2010

C’était croiser un collègue dans le métro, le matin, et savoir qu’il faudrait terminer le trajet à deux à moins de faire semblant de l’ignorer (détourner la tête, le corps, fermer les yeux, faire celui qui se repose, changer discrètement de rame, être pris d’une frénésie texto, se perfectionner encore à Snake), au risque qu’il constate l’évidence de cette ignorance volontaire. Finalement, comme il fallait bien sortir du métro à la même station (à moins d’utiliser une autre stratégie) faire le pas et être, si tôt, contraint.


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On avait cherché au bord du fleuve, un quai où de nombreuses voies congestionnaient la circulation des voitures, et que le soleil de milieu d’après-midi éclairait comme par une belle journée d’hiver. On avait cherché cette image le long du fleuve, à son nord là où est le centre car cette image disait précisément que c’est ici qu’était le centre, ici que s’exerçait le pouvoir sur la zone dont c’était le centre et qui s’étaient, zone et centre, mutuellement et sans équilibre institués comme tels, ici que convergeait les forces, incluant celles qui constataient y avoir momentanément atterri tout en se demandant bien ce qu’elles y faisaient, puisqu’elles n’avaient d’autre rôle à y tenir que celui de voir que c’était bien ici que tant de choses se passaient derrières les façades monumentales à colonnades et les immeubles vitrés de métal et de béton, au milieu des taxis et des berlines avec chauffeurs, des autobus qui passaient là plus vite que tous sur le couloir qui était le leur. On avait cherché cette image, voulu la retrouver dans l’espace, faite de bitume, de pierre, de parpaings et de fenêtre, d’air réel et de gaz d’échappements, celle qu’on n’avait connue qu’en esprit, par une synthèse onirique et imaginaire. On ne l’a pas vue, ce n’était pas là, ce centre n’est pas de cette ville, le monde est entre d’autres mains plus lointaines ou plus proches, sans image seule.