samedi 9 avril 2011

512 : vendredi 8 avril 2011

Qui l’eût cru de Léon : antique, philosophe et terroriste…

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Tu manques de sommeil, tu te traines, même la journée d'une betterave est plus animée que la tienne. Tu jettes un œil dehors. Comment s'appelle cette chose déjà ? Son nom, tu l'avais sur le bout de la langue il y a une minute. Et puis, plus rien. Demande à ton voisin, il doit s'en souvenir, lui. Et puis non, tu aurais l'air stupide. Bien sur, t'es à la masse, ces derniers temps ont été un peu surchargé, en plus la vie moderne où l'on n'arrête jamais de cavaler et patatitata... Est-ce que ça suffit pour expliquer ce trou noir ? Tu réveilles le chien de ta mémoire, qu'il aille chercher ce satané nom qui ne revient pas. Les yeux attentifs, surpris, et voraces de l'animal te fixent, de toutes tes forces tu balances un Alphabet Majuscule vers les ombres de ton cerveau – allez, rapporte ! A la vitesse de l'éclair, il détale. Par la fenêtre, tu remarques d'autres trucs agréables à regarder.


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C’était se demander s’il serait nécessaire de rester demain, weekend de boulot, pour rattraper car le client ne savait toujours pas, pensait toujours, lundi, avoir sa version, confortablement testée et installée, et nous à recoudre l’effilochage avec les dents, à resserrer des boulons de la mauvaise taille avec des fourchettes tordues pour clefs, à peindre la carrosserie avec du crayon papier, regardant le ciel menaçant de beauté qui allait, sans l’ombre d’un doute, lundi, effacer nos vains efforts.


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Le jardin n'était pas grand, mais qu'importe, il y avait place sur la petite surface dallée, devant, quand la courte allée venant du portail s'élargissait, s'allongeait devant la façade, pour trois fauteuils coques en plastique, très laids et très confortables, et leur petite table ronde - et ils étaient, avec belle franchise, d'un blanc fade, mat, un blanc qui ne pouvait exister que dans le monde du plastique, vaguement parent, seulement, de celui de certains parpaings. On les installait autant que possible en dehors de l'axe de l'allée, en faisant confiance aux thuyas nains pour nous masquer, et sous la fenêtre du salon qui servait de passe-plat parce que la tante ne sortait pas, avait toujours mieux à faire à l'intérieur, dans sa cuisine, et puis elle n'aimait pas ça, manger dehors, et puis d'ailleurs, il n'y avait que trois sièges, et elle haussait les épaules quand nous proposions de sortir une chaise pour moi ou pour Jean qui était le plus jeune. Et finalement on aimait assez ça, on avait sa cuisine qui était bonne, et lui il pouvait parler, nous raconter. Il s'en donnait à cœur joie d'ailleurs, et ça durait, on était bien – et lui, peu à peu il déplaçait son fauteuil, il se tournait vers la maison, il était presque au centre, se moquant d'être en vue, et il la regardait, il était fier des petits angelots – il disait amours – et femmes nues qui ornaient la petite façade, qui prenaient toute la place, et il nous parlait de son père qui l'avait voulue comme ça.


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Elle fait le deuil de mots non entendus. Non prononcés. Ou bien articulés, mais sans parvenir jusqu'à elle.