lundi 22 août 2011

645 : dimanche 21 août 2011

Contrairement aux Atterris, les Atterrés voient très bien la lune. Ils ne voient même qu’elle. Et ce spectacle les abasourdit, les écrase, les plonge dans une somnolence perpétuelle et confondante. La nuit gagne lentement du terrain sur le jour et le soleil lui-même ne leur rappelle bientôt plus qu’une chose : la lune, la lune, toujours recommencée. Finalement, le cœur rongé de cratères, les Atterrés s’éclipsent.


-----------------------


Dans mon rêve il y avait une jeune femme, je crois, assise sur une plage, je l'ai cru, bornée par une barrière comme un espace privé, une plage assez étrange sur laquelle était tracé – un âne, mené droit, tirant une longue poutre derrière lui ? Un géant appliqué avec règle, compas et une gigantesque épingle ? - était donc tracé, un quadrillage régulier comme un dallage. Elle semblait un peu lourde, mais avec une belle nuque, sous un casque de sages cheveux châtains, et de douces épaules, une attitude réservée, jambes à demi pliées, corps légèrement penché, un peu en oblique, bras abandonnés souplement sur les genoux, dans une molle robe à fleurs qui rappelait les illustrations des romans de Zénaïde Fleuriot ou une scène d'un film néo-réaliste italien. Du visage on ne voyait rien, et d'après l'inclinaison de la tête, son regard se perdait quelque part sur le sol, peut être à l'intersection de deux lignes. J'ai senti une petite peine, une inquiétude pour elle, si humblement vacante, comme résignée, sous l'ombre qui s'étendait sur elle, qui la surplombait, se penchait, sans que l'on puisse déterminer si c'était avec malveillance ou au contraire pour la secourir, mais comme je tentai de m'approcher pour la prévenir ou l'aider j'ai réalisé que c'était mon ombre qui s'attaquait à elle, commençait à l'effacer.


-----------------------


Le jeune homme pose ses mains sur les seins de la statue. Il effleure le sable humide, souligne les contours, modèle les arrondis. Du bout des doigts, il balaie le sable sec... Il caresse sa nuque et ses épaules, lissant les dernières aspérités. Ses bras sont placés le long de son corps. Ses mains reposent sur ses fesses, avec aplomb. Ses reins sont cambrés... Elle se tient en équilibre sur le dôme de sable. De l’ongle, le jeune homme précise ses seins. Leurs pointes se dressent bientôt. Il les frôle du doigt pour les adoucir. Des grains de sable courent sur la plage humide.


-----------------------


Il se souvient du vent bousculant sa maison, des intempéries contre lesquelles il fallait se méfier. Franck aimait sa maison, son jardin enfiévré de plantes désordonnées, ses tuiles vieillissantes et le sifflement dans la cheminée en harmonie avec le grincement des poutres.