mercredi 8 décembre 2010

390 : mardi 7 décembre 2010

Poussant le souci de l’harmonie phonétique jusqu’à la maniaquerie la plus absolue, Léon ne supporta jamais l’idée qu’Emma l’aimât.

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C’était oublier d’avoir réglé le radio-réveil et, alors que le cadran montrait déjà 08:07, sentir monter cette angoisse, vitale, bien connue, puis, en colère contre le radio-réveil, contre le micro-trottoir, contre son chef, contre son patron, contre la société, contre soi se lever, se laver, ne pas se raser, ne pas manger, foncer, ne pas traîner.


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Sans doute peut-on toujours mettre les pas dans les traces des pas, Paris est toujours là (et Boulogne, et Senlis, et Belle-Île), c'est LEUR Paris qui n'est plus, et c'est comme s'il n'avait jamais été, et le jardin non plus, les chats, l'avenue sous la pluie, les ripailles sur la terrasse, les ombres paisibles s'allongeant sur le silence encore épaissi, sur tout ce qui est si incommensurablement lointain, oblique, ultérieur, latéral que l'on a envie d'écarter d'un revers de la main ce sphinx inconvenant qui s'obstine à inlassablement poser les questions auxquelles nous n'avons plus envie de répondre... Du plus profond, tu sus toujours qu'il ne s'agit que d'un PASSAGE, même si tu ne sais pas l'expliquer, même si à toi aussi les mots se dérobent... Ce n'est pas l'immortalité dans le sillage du Nazaréen, ou l'improbable Paradis où les Houris dansant, ou la Réincarnation, ou la poursuite du Rien sous couvert de Tout que le sage à la fleur de lotus jadis convoqua pour abolir avec l'espoir son lancinant contraire... C'est l'absolue certitude, ni justifiée, ni confirmée, simplement là, massive, inébranlable, sans l'appui de subtiles théologies, sans doucereuses consolations susurrées, que rien n'est jamais achevé, ni définitif, que tout n'est qu'expérience et recommence, suscitant et accueillant d'autres rives et d'autres départs, les atomes se recomposant inlassablement jusqu'à ce que le maître des routes du temps s'en lasse aussi, ce que tu ne saurais ni concevoir, ni accepter... Ce n'est qu'en sachant que bientôt tu te rejoindras, ce n'est qu'en entrevoyant ta place sur la roue que tous parcourront que tu ES, pleinement, librement, autant et comme tu l'as toujours été, hors lignes de fuite, loin des mirages du devenir... Il n'y a pas de dernière demeure parce qu'il n'y eut jamais de première : cela au moins, tous ceux qui ont croisé un bout de ton chemin le savent... De ces ondes, de ces intimes vibrations, de cette musique, qu'ils fassent ce que tu fis, à LEUR manière, qu'ils sachent ce qu'ils peuvent, illumination entre toutes la plus humble et la plus ardue... QU'ILS SOIENT... « Parting with friends is sadness. The only one. »