mardi 9 octobre 2012

994 : lundi 8 octobre 2012


La vie des mille-pattes est un paradis et nous ne le savions pas, belle météo ! L’ensemble rayonne-t-il à trois degrés Kelvin ou moins ?

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C'était comme si l'on ne savait plus où donner du regard, tellement tout était manifeste, montré dans un luxe et une profusion sans pareils, avec précision, minutie et il faut le reconnaître, une certaine exhubérance, comme une magnificience du détail ; il y avait là de l'orgueil, une force et une volonté évidentes, pour ne pas dire une certaine détermination. Le futur comme pure ouverture, ouverture qui vous regarde dans les yeux. Tout se concentrait cependant en une image en mouvement, un enchaînement de gestes souples et virevoltants, l'image semblant presqu'en même temps se dissoudre en une myriade de signes et de reflets. C'était presque futile - sans motif, sans raison - mais ça n'en était pas moins immense, dense et lourd. Ce n'était, après tout, qu'une sorte de parade amoureuse, avec ses artifices, avec toute la splendeur de ses couleurs et de ses ornements, de ses parures et de ses danses. « Derrière l'apparente vacuité des intentions, par delà le propos qui serait celui de divertir et instruire, se pose, semble-t-il, la question de la manipulation mentale. »

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C'était à la fin du premier mois d'école, c'était s'entasser à l'arrière d'une traction, celles dont les anciens se servaient pour transporter les châssis, c'était cet éternel effort pour ne pas montrer son effarement de pensionnaire transplantée, c'était la jubilation qui montait, c'était les chants idiots beuglés, c'était la mélodie de certaines chansons empruntées aux carabins, c'était découvrir la beauté du tracé de cette étrangeté, l'autoroute, c'était contourner la cité universitaire, c'était le bras autour des épaules qui forçait à se pencher dans les virages, c'était Orly, les voitures qui se vidaient, c'était le grand massier sélectionnant la plus jolie des cinq nouvelles, et bien entendu ne pas être désignée, c'était la fanfare regroupée, c'était le pompier et d'autres airs, la fille et l'énorme gerbe, c'était notre irruption dans l'aérogare, c'était chercher le responsable, c'était une délégation, fanfare, fille, anciens, remettant à une hôtesse de l'air notre bouquet pour le mariage de Farah Diba, c'était rentrer, retrouver l'atelier et l'un des trois bourets de l'illustre ancienne.

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Il y a cette mare sous le grand saule pleureur. Les zèbres s'y abreuvent à la brunante. Le vent léger remue leurs crinières d'iroquois. De petits oiseaux piaffent et volettent alentour. C'est à cette heure qu'on peut voir Elise, la mère d'Hippolyte, se promener dans la plaine. Tandis que le buvard de la nuit boit le jour, Elise louvoie dans l'interstice vespéral, en quête d'un lieu convenable. Dans sa longue robe bleue, ample et jeune, où le moindre vent trouve asile, elle semble une apparition. L'âme d’un port en quête d'une baie. Ses longs cheveux noirs disent les nuits du large. Leurs mèches fleurent l'iode immense et dans ce corps qu'elles dévalent déferlent les désirs remuants de la houle que rien ne put jamais combler. Elise, verticale au cœur de ses voiles, s'avance parmi les zèbres. Elle caresse leurs museaux. Les quadrupèdes bonhommes se laissent faire. Ils aiment bien sentir son odeur marine, comme elle se glisse dans leurs naseaux. Elise s'assoit sous le saule. Des larmes se font dans ses yeux. Quand reviendra-t-elle à l'amour ? Le lieu lui échappe encore. Quand s'ancrera-t-elle dans une baie lumineuse comme autrefois ? Et les grillons lustreront le silence. Et les pierres auront la présence des choses précieuses. Les chemins parmi les arbres attendront ses pas comme une patère sur le mur le manteau du visiteur.