mercredi 26 janvier 2011

439 : mardi 25 janvier 2010

Foutu souci d’harmonie phonétique qui, même lorsque Léon brûlait d’envie de contredire Emma l’empêchait de dire mais.

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Nous sommes des variantes de la même ombre, ne coïncidant qu'avec son déguisement, alliance du renvoi et du vol, du plomb et du vide, de ce qui, en cette heure, n'a ni visière, ni visage, ni orgueil, ni droit à faire valoir, ni ténèbre à expier...


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C’était dans le métro, somnolent, concevoir la clé de voûte de l’édifice en cours, l’eurêka inattendu qui pouvait épargner une semaine de développement et aussitôt comprendre ce qu’il était possible de gagner à poser, discret, cette clé, sans signaler sa présence, pour quelques temps encore.


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Jeanne disait en riant, comme une excuse, que sa maison avait la porte la plus laide de sa petite rue. Ce n'était pas tout à fait vrai. Elle ne méritait pas ce titre. Elle était simplement moche. Il y en avait une très noble, qui faisait un peu tâche, il y en avait une un peu bizarre et assez charmante par le soin apporté au choix des couleurs, il y en avait des taguées avec plus ou moins d'abondance, il y en avait deux ou trois très ordinaires, ennoblies par leur voisinage avec celle de Jeanne, qui n'était même pas laide, non on ne pouvait pas dire cela, mais moche. Si moche que l'intérieur qu'elle cachait ne pouvait être qu'agréable, un peu étrange peut être mais raffiné, amusant, semblable à ce qu'on connaissait de Jeanne. Et, irrémédiablement, on était déçu.


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Les yeux de Marie-Anne se ferment... Allongée dans son lit, bras en croix et jambes écartées, Marie-Anne fait l'étoile de mer. Depuis le décès de son mari, elle s'étale ainsi dans leur ancien lit. Elle a troqué son vieux papier peint pour une peinture blanc cassé, elle a décroché les tableaux de famille et relégué porcelaine et colifichets dans une poubelle. Marie-Anne a soixante et onze ans, la peau fripée, les cheveux blanc. Des yeux noirs profonds et une bouche dont les coins sont barrés d'un plis amer. Marie-Anne est une petite dame discrète dont on ne se souvient pas. Ce n'est pas grave, elle n'y tient pas. Ce soir, elle a bu sa tisane, lu sa page de livre, puis elle a éteint la lumière, s'est étirée et a attendu le sommeil ainsi étalée. La mort peut bien la surprendre dans une telle position, elle s'en fout.


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Je m’aperçois, comme je vieillis, que les idées qui me sortent de la tête ont de plus en plus de mal à y rentrer. Celles qui subrepticement se préparaient, s’approchaient d’une faille de ma pensée, guettaient l’occasion ; une seconde d’inattention de ma part et pfuit : plus personne. Je ne ménage pas mes efforts pour les rappeler à la raison (et à la maison) mais sans parvenir jamais à les convaincre. Il faut dire que pendant ce temps-là les idées, de moins en moins nombreuses, qui m’animent encore un peu en profitent. Se détendent, prennent leurs aises, se croient maîtresses des lieux, posent leurs pieds sur la table basse, s’affalent, s’abêtissent. Et c’est ainsi que mon cerveau se ramollit.