lundi 31 mai 2010
200 : dimanche 30 mai 2010
dimanche 30 mai 2010
199 : samedi 29 mai 2010
samedi 29 mai 2010
198 : vendredi 28 mai 2010
vendredi 28 mai 2010
197 : jeudi 27 mai 2010
jeudi 27 mai 2010
196 : mercredi 26 mai 2010
mercredi 26 mai 2010
195 : mardi 25 mai 2010
mardi 25 mai 2010
194 : lundi 24 mai 2010
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Quand il était chez lui, et avec l'âge gravir l'escalier étroit qui y conduisait devenant de plus en plus pénible, il hésitait à en sortir, il se croyait selon les jours capitaine assurant avec détachement la bonne tenue du cap sur une route immuable, ermite plaquant sérénité sur ses impulsions renaissantes après avoir renversé l'échelle d'un coup de pied secrètement rageur, ou certains jours d'euphorie si grande que toute hésitation, réflexion, conscience, honte, étaient abolies, comme un seigneur dominant la ville, et ces jours là il se tenait sur la loggia, un peu en retrait et plongeait, avec une paresse doucement méprisante, vaguement intéressée, son regard sur la vie qui s'écoulait là, en bas, sous la lisse muraille qui dévalait de lui au sol.
lundi 24 mai 2010
193 : dimanche 23 mai 2010
"Je vous écris d'un pays lointain" (15) Je ne sais pas vous, mais le temps que proposer au nuage fait fracture de l’un à soi. Mon voisin ainsi, s’exhibe à pleine journée et cornaque sans relâche, sans jamais prendre peine de ce que le ciel. Dans ma bouche pas un pan de reproche, je vois et dis. Mais comment ne pas rouler question dans sa bouche quand la vue d’une vie telle. Difficile de clore les yeux dessus sans que secousse aux épaules, sans qu’un peu tremble dans le dos. Vouloir lancer grappin ne sert à rien, parce que trop de temps à suppurer de même, sans regret ni chaleur. Seulement soi prendre le temps des fenêtres, et sans crainte de délivrance se distiller à plein rebord. Grand jouir à s’embaumer de l’incertain passager, regard délivré de l’ombre étirée mais sans surprise. Je m’obstine qu’ainsi de votre part, s’offrir en accord d’horizon. Bien à vous, …
dimanche 23 mai 2010
192 : samedi 22 mai 2010
samedi 22 mai 2010
191 : vendredi 21 mai 2010
vendredi 21 mai 2010
190 : jeudi 20 mai 2010
jeudi 20 mai 2010
189 : mercredi 19 mai 2010
mercredi 19 mai 2010
188 : mardi 18 mai 2010
mardi 18 mai 2010
187 : lundi 17 mai 2010
lundi 17 mai 2010
186 : dimanche 16 mai 2010
dimanche 16 mai 2010
185 : samedi 15 mai 2010
samedi 15 mai 2010
184 : vendredi 14 mai 2010
vendredi 14 mai 2010
183 : jeudi 13 mai 2010
jeudi 13 mai 2010
182 : mercredi 12 mai 2010
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Se vouloir locale. Se souvenir de la cuisine simple, goûteuse et commentée, de Gaby, des histoires qu'elle aimait raconter sur les plats, de son refus de nous « avoir dans les pattes » pendant leur confection, du mystère qu'ils gardaient, dans la sophistication cachée qui permettait, en quelques gestes, de combiner des aliments simples en une merveille de saveurs équilibrées, qui s'épanouissaient lentement à partir du plaisir immédiat, et dont, certains jours de détente, d'orage familial endormi, nous commentions la réussite, l'histoire de nos dégustations. Alors on achète des petits pots de l'industrie alimentaire locale, affichée ou réelle, des barquettes chez le marchand d'olives, en imaginant qu'elles ont été préparées par les femmes de la famille.
mercredi 12 mai 2010
181 : mardi 11 mai 2010
mardi 11 mai 2010
180 : lundi 10 mai 2010
lundi 10 mai 2010
179 : dimanche 9 mai 2010
Marie était arrivée chez elle au crépuscule, chez elle enfin, après ce trou qu'elle décidait, dents serrées, d'oublier, enchaînement d'un travail provisoire et astreignant, juste assez pour lui permettre de glisser inconsciente dans cette grande ville étrangère, d'un accident, d'une longue hospitalisation, juste assez pour y dissiper ses gains, d'une trop longue errance d'asile en asile, chez des parents et amis, pour reprendre force, tenter d'émerger, grâce et malgré les communautés où elle se trouvait propulsée, de récupérer son corps, renouer avec la sensation d'être au monde, sans réellement y parvenir. Elle avait souri, et puis flotté un peu dans la crainte que les murs, les meubles, aient perdu l'habitude de sa présence, et son corps retrouvait, sans presque qu'elle s'en rende compte, les gestes, les évitements, les enchaînements familiers. Elle avait trouvé un gratin dauphinois, une salade, un feu, un lit préparés par la vieille Madame Lepers, dîné rapidement sur la grande table de la cuisine, devant la cheminée - et c'était aussi simple et bon, que le fin sourire ridé et les yeux de son amie - pris un livre au hasard, s'était endormie dessus. Elle s'est réveillée assez tard. Le soleil faisait une grande tache sur la terre cuite du carrelage dans la cuisine. Elle s'est fait du café, a trouvé que son odeur était incomparable, a pris un bout de fromage, est sortie pieds nus, en liquette. Caresse encore un peu fraîche, piquante, mais attiédie, sur ses jambes, son cou, le haut de ses seins. Elle s'est cambrée, a regardé, s'est figée. De l'autre côté du ruisseau, au bout de son petit carré en désordre, les volets de la maison étaient ouverts, des draps séchaient, un édredon pendait de l'appui d'une fenêtre. Un mélange de réactions simultanées, sans qu'elle arrive à les ordonner. Le souvenir tendre et douloureux de ceux qui avaient habité là, le regret de la liberté qu'elle avait, au bout d'un certain temps, après la mort de la mère et le départ des autres, découvert peu à peu, savouré avec de moins en moins de honte, cette impunité, cette royauté sur ce petit espace sien, et puis aussi le plaisir de voir revivre ces murs, une petite curiosité, une petite crainte, l'idée découragée des rapports à établir, aussi cordiaux et aussi distants que possible. Elle a eu honte brusquement, a vérifié qu'aucun humain n'était visible, est rentrée s'habiller.
Il existe de tels lieux dans le monde réel, laissés à l'écart, délaissés, tout près des sentiers battus, au cœur des villes et de leur agitation. L'effet de surprise que leur découverte déclenche est relatif à l'intensité de la sensation qu'il n'ont pas de place possible dans la trame serrée de la ville. Plus la concentration d'activité est dense juste autour plus il semble miraculeux, anormal et irréel que leur existence soit ici possible. La souveraineté de leur existence précaire et de leur invisibilité défie notre expérience courante du réel et valide en acte la puissance de l'imagination qui façonne, par delà toute hypothèse initialement crédible, la possibilité de tels replis aux creux du réel. Il s'agit là comme d'une pièce de tissu serré dans laquelle se trouverait un trou que nul ne serait capable de voir, et dans lequel nous marcherions désormais, comme en une réalité parallèle, non moins réelle cependant.
dimanche 9 mai 2010
178 : samedi 8 mai 2010
samedi 8 mai 2010
177 : vendredi 7 mai 2010
vendredi 7 mai 2010
176 : jeudi 6 mai 2010
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jeudi 6 mai 2010
175 : mercredi 5 mai 2010
Je rêve, vaguement, mais souvent. Il y aurait un lit qui serait mien, très grand, très large, garni de draps de métis blanc, lavés et re-lavés, pas usés mais souples et doux. Un large lit pour y étaler mon sommeil, délicieusement, ou pour dormir à deux. Il y aurait des persiennes et le soleil filtré. Il y aurait un air vibrant de fraîcheur. Il y aurait, posé sur les draps – et je retarderais un moment, pour le plaisir de ce suspens du temps, redressée sur mes coudes, oreillers relevés pour encadrer ma nuque, le geste de mon bras pour l'attirer vers moi – un plateau de métal argenté, une chocolatière avec son fouet, une tasse de simple porcelaine blanche, un confiturier plein de miel, pas de pain, un peu de bruccio sur une petite soucoupe, et je sourirais, un peu, comme tous les matins, de la désapprobation vertueuse de celle ou celui qui aurait préparé l'ensemble.
mercredi 5 mai 2010
174 : mardi 4 mai 2010
mardi 4 mai 2010
173 : lundi 3 mai 2010
lundi 3 mai 2010
172 : dimanche 2 mai 2010
Sous la douche, elle écoutait, par la porte ouverte sur le nid de sa chambre, la radio la mettre en présence de merveilleux centenaires, surtout un homme à la voix ferme, aux phrases solidement dessinées, assez pour que la gentillesse de la jeune journaliste et son timbre clair, involontairement triomphal, perde de sa condescendance réfrénée. Et elle se redisait qu'elle admirait, mais n'avait aucune envie de vivre aussi longuement, ridicule tout de même un peu trop grand, même pour elle qui en avait l'habitude, pour celle qui avait décidé à l'adolescence que la vie ne la concernait pas, qui jouait avec l'idée de sa fin de façon si familière qu'elle ne s'y décidait pas, et avait laissé son corps batailler avec une force entêtée lorsque la mort était devenue une possibilité moins éventuelle. Rentrée dans la coquille bleue de la chambre, habillée, immobile devant le miroir, sans se regarder, ou pas vraiment, par habitude, pendant que la radio s'effilochait en chansonnettes, continuant sur ce chemin, parvenue à sa décision ferme de ne pas arriver au moment de la dépendance, par fierté égoïste, et pour ne pas gêner, une petite colère impuissante lui est venue en repensant à sa dernière tentative – elle avait appuyé juste assez pour que cela ne soit pas simplement propos glissants dans leur conversation tranquille - pour obtenir l'engagement, l'acceptation par ses frères et sœurs, de respecter son refus de voir ses cendres être conservées et s'imposer aux restes de ses parents (encore surprise par l'indignation que cela avait soulevé), et de toute cérémonie, surtout religieuse. Devant le refus, cette fois très net, elle avait plaisanté, en disant qu'à vrai dire, puisque bien entendu elle n'existerait plus, cela devait lui indifférer. Mais justement non, et elle se révoltai à cette idée, pensai que l'amour ou l'affection pouvait être une façon de s'approprier, de nier, son objet, se désespérai de savoir qu'elle ne pourrait, alors, dénoncer l'imposture que cela serait. Elle cherchai un moyen de le faire, de se dégager, de les laisser seuls avec le mensonge dans lequel ils se complairaient (petit sursaut en imaginant le prêtre forcément inconnu qui infligerait ses mots au peu qu'elle avait été, et qui ne le concernait pas). Une fois encore, elle s'est calmée, un peu, pensant à l'ironie de cette mascarade, petite vengeance – et elle a pensé au reste de la journée.