Une main se pose sur mon front, j’ouvre un œil, Ivana blonde fée est à côté de moi. « Tu as de la fièvre, je crois, tu gémissais, je suis venue voir… » Pourquoi m’a-t-elle tiré de là, je lui ai rien demandé ! je voulais voir, moi, où ça allait, tout ça ! Zut et zut et flutte alors : me voilà à nouveau dans la prison blanche. J’ai envie de cracher ma colère, mais un cheveu pris dans le sommier m’en retient. Je me contente d’un regard de tueuse et son menton se renfrogne, interloqué. « Bon, t’as bien fait, en tout cas, c’est nul, leur film. »
lundi 30 septembre 2013
vendredi 27 septembre 2013
1188 : jeudi 26 septembre 2013
Mon souffle me revient de plus en plus proche. Petits êtres tapis dans mon ombre, qu’attendez-vous pour me chahuter ? Un grattement sur ma droite, j’essaie d’en saisir un par la patte, mais je n’attrape qu’une racine. Tirer… Alors le cercueil s’incline et je glisse glisse glisse, et mes cheveux se traînent et s’accrochent, aïe, je descends vers plus loin de la verdure encore. Il fait enfin doux, tiède puis vraiment chaud ; c’est si bon d’aller vers les enfers.
jeudi 26 septembre 2013
1187 : mercredi 25 septembre 2013
Et si j’étais à jamais enterrée vivante ? Je sens mon souffle, je suis vivante, mais je sens aussi son retour : la paroi de dessus est proche, me voilà basse de plafond. Le pire, c’est que j’en suis responsable : qu’allais-je donc faire à explorer les profondeurs de l’arbre ? Pourquoi n’ai-je pas couru, pourquoi cette peur de la flamme ? Je ne croyais donc pas assez en moi, à mes semelles d’étoiles ? Je pouvais m’envoler et me voilà noyée sous la terre. Les farfadets attendent mon hurlement de terreur pour lancer leur attaque : ils ont en main plumes et cotillons, leur objectif : me faire rire de la mort.
mercredi 25 septembre 2013
1186 : mardi 24 septembre 2013
Je suis étendue, il fait froid et humide. Est-ce moi qui suinte ainsi ? Est-ce l’eau qui a éteint l’incendie ? Car je n'entends plus au-dessus moi l’arbre, ni ne sens l'odeur de ses racines en sursis. Je tends le bras, je brasse l’air noir, j’écarquille les yeux pour manger de mes pupilles l’étrange. Mais rien. Je suis peut-être aveugle au milieu de mille farfadets discrets qui m’observent sans un mot avant de décider s’ils vont me consommer vivante. Me soulevant sur un coude, je desquame par plaque d’humus. Une pointe fulgure à l’intérieur de mon crâne… Tu penses trop, ai-je entendu dans mon coma… À l’instant T, je ne pense pourtant pas , je ressens : ça caille.
mardi 24 septembre 2013
1185 : lundi 23 septembre 2013
Agonie caniculaire : la même sans marque, c'est possible ?
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De dehors perce un rythme binaire, qui se finit en cascade, balle blanche et petite sur un sol sans concession. Si j’allais ? Dehors, la liberté peut-être… Mes yeux se brouillent de fatigue, le souvenir d’un autre choc, un plic, ploc sur mon front, je suis sous l’arbre, il faudrait que je me relève, ou tout du moins que j’arrive à ramper vers un souffle d’air, mais dehors, des fumées ! brûle le bois, craque l’univers, où est l’issue ? Ma main chancelle… ouf, le lit.
samedi 21 septembre 2013
1184 : vendredi 20 septembre 2013
Une
main sur mon épaule, c’est Ivana. Je me raccroche à sa griffe pour garder tête
froide et mobile. Elle me dit : « viens à la télé, c’est une comédie ».
Je n’aime pas qu’elle m’ordonne. Et avoir souri me suffit, je ne veux pas
aujourd’hui rire, craignant le choc thermique dans mon univers en expansion.
Elle fronce les sourcils, petite moue terrible ; à peine a-t-elle fait
demi-tour que je regrette mon refus. Pourquoi suis-je autant attirée par l’immobilité
solitaire dans l’étreinte de Morphée ?
vendredi 20 septembre 2013
1183 : jeudi 19 septembre 2013
Jour - nuit. Derrière le mur. Jour, nuit ; jour, nuit ; jour, nuit ; jour, nuit ; jour, nuit. Autant d'oeufs que de jours factices.
jeudi 19 septembre 2013
1182 : mercredi 18 septembre 2013
Tandis que certains se donnent rendez-vous pour une tisane en fin de soirée, je traîne des pieds vers la chambre. A droite, suivre la ligne. Un courant d’air venu d’on ne sait où, tout est fermé. Sensation d’être sur une balançoire qui redescend de son élan vers plus haut. Bouche sèche. Ai-je mangé de ce gâteau ? Sont-ce mes membres qui s’engourdissent, mes sens qui me trahissent, ou tout n’est-il pas en train de fondre autour de moi ?
mercredi 18 septembre 2013
1181 : mardi 17 septembre 2013
rumeur sol écrasé. chicane d'os on dirait le charnier des pas que les pas broient. comme compter. spoliation de terre franchissable. extorsion absurde. saccage du désert. parole des prédateurs marques d'humain et noms de lie. urines et empreintes. dénomination inviolable. germes de prescription.
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Autour des lasagnes qui s’effacent des assiettes, je réalise que la parole s’est libérée. Il est question du programme télé du soir : film ou téléréalité (télé quoi ?). A-Eddy sourit dans ma direction, il dit qu’il préfère une bonne partie de ping pong « à la fraîche », et son voisin de répliquer que, c’est sûr, les grandes chaleurs, c’est terminé. Une assiette de fromages apparaît au milieu de la table, chèvre et Emmental. La combinaison des deux m’apparaît comme un summum de gastronomie, alors que d’habitude je trouve ça trop fade, ne jure que par Roquefort et brie très fait. Mais là, le goût subtil éclate, j’utilise le pain que l’on m’a donné, qui craque comme du pain frais tout juste sorti des fours. Je savoure si bien que le dessert arrive avant que je n’aie eu le temps de terminer mes miettes blanches et jaune ciré. Salade de fruits (jolie, jolie), des fruits frais, je croque le raisin dans ma dernière bouchée de fromage et je me rends compte que sans destinataire cependant je souris.
mardi 17 septembre 2013
1180 : lundi 16 septembre 2013
Assistanat au bout des doigts, Mexicaine minimaliste, la remorque est intacte : Venise dans la brume, à défaut d'en trouver parmi les jardins ? Autrefois s'accroche encore.
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Maman ! Les yeux ouverts qui fixent ceux du géant maigre, je l'appelle de toute mon âme. Appeler Maman. C’est elle qui me sortira de ce mauvais rêve aux murs pastel. Je cherche autour de moi à qui m'adresser à qui demander, qui supplier s'il le faut… Ma voisine me tend la corbeille de pain. « Ça va bien se passer » gronde-t-elle sur le ton des secrets. Focus une table plus loin, Ivana est en train de me faire un petit signe de la main. Elle est radieuse. Le bleu lui va bien.
samedi 14 septembre 2013
1179 : vendredi 13 septembre 2013
Alors je « pause ». Un morceau de pasta qui fond entre langue et palais, je laisse la viande spongieuse libérer son coulis de tomate sur des papilles attentives et les morceaux d’oignons qui croquent doucettement entre mes prémolaires. Dolce dolce… Le vendredi, c’est ravioli, maman, dit-moi que tout ira bien. J’ai oublié de saupoudrer avec le Parmesan.
vendredi 13 septembre 2013
1178 : jeudi 12 septembre 2013
de l'eau sur les charpentes noires et rien. corps absent ou savoir épuisé. le lieu et les choses unité d'un désastre. crémation interrompue. nombre tronqué. virginité du sol d'épaves et d'eaux noires
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A-Eddy ne tend pas son assiette. C’est pourtant lui que je voulais servir en premier. Ou en dernier, puisque les derniers seront les premiers. J’ai du mal à découper la couche de pâte qui colle au fond. Ma mémoire reviendra sûrement si… La dame d’à côté en reposant son assiette mezzo voce me murmure : « tu penses trop ».
jeudi 12 septembre 2013
1177 : mercredi 11 septembre 2013
Hier soir, par exemple, où je ne sais plus quel soir, le dernier dont je me souviens, en tout cas… c’était des larmes plein le cœur que je suis sortie en catimini, retrouver Eddy et Séverine aux portes du cimetière. Mais ça se brouille à nouveau, au moment où j’entre dans ce caveau, et que, qui étais-ce ? Un plan de lasagne est posé sur la table. Les couverts de services sont en face de mon verre, les attablés me regardent. C’est à mon tour.
mercredi 11 septembre 2013
1176 : mardi 10 septembre 2013
dos tourné et la nuque comme un clou obscur. derrière nuit rivée à la nuit. devant incendie simulé astre rouge opercule palpébral.
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La tension est montée d’un cran, je la sens de mon ventre à ma gorge. A-Eddy se tient plus droit, aussi. Alors ma voisine rit. Un petit rire, un souffle d’air tiède qui vient caresser nos nuques, et la femme aux cheveux de jais dont les lèvres minces s’attardaient sur chaque fourchetée lui fait un clin d’œil et pousse le grand homme mince du coude : « elle est jolie quand elle sourit, non ? » Elle s’adresse à Eddy, par ricochet, je le sais, et je me rends compte que ma bouche est figée en un rictus amer. Depuis combien de temps n’ai-je pas souri à la vie ?
mardi 10 septembre 2013
1175 : lundi 9 septembre 2013
Félicitations, un dessous de plat chauffant ! Ou bien une bouillotte ultra-plate... Croisons les rémiges : quelle sorte de portable ?
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Tout à coup, un silence. A mi-chemin entre l’assiette et ma bouche, je laisse goutter la mie de pain. Il me semble que la plante bizarre et tordue a frémi. Puis, l’ange passé, les conversations, le cliquetis et les craquements de machoires reprennent. Je ne sais quoi dire pour lever le plomb de notre table. Personne n’a demandé mon nom, je ne peux donc questionner personne sur son identité. Sommes-nous tous des anonymes ? Les assiettes sont vides.
samedi 7 septembre 2013
1174 : vendredi 6 septembre 2013
Derrière, voix féminine : « la cigarette électronique ? » Mon voisin de gauche fait : « Pffffff… ». Il lève les yeux au ciel et saisit un morceau de pain qui devait être le mien, mais il me semble qu’il vaut mieux ne rien relever. A-Eddy prend à son tour du pain, ma voisine me regarde d’un coin de paupière tombante et pousse sa tartine vers moi, qui obéit et peut ainsi saucer des épanchements de vinaigrette un peu trop moutardéchalotée.
vendredi 6 septembre 2013
1173 : jeudi 5 septembre 2013
Une salade de pommes de terre posée au centre. Main levée de la dame ronde et triste, elle me sert sans me demander mon avis. Puis elle sert l’avatar d’Eddy. Puis elle se sert et tend les couverts au grand escogriffe qui s’occupe de l’autre moitié de table. Je ne sais même pas si j’ai faim. Je mange pour faire comme les autres. A la table d’à côté, ça cause, des aigus joyeux. Pas ici. Je lève un œil. A-Eddy ne mange pas.
jeudi 5 septembre 2013
1172 : mercredi 4 septembre 2013
Sur son visage une lumière du soir. Je tourne la tête vers le jour qui perce entre des arbres feuillus. Leur faisant face, trois ficus dont l’un étrange, aux petites feuilles parsemant des branches tordues, peut-être moribondes ? En face de moi, un grand vieux gars à la mâchoire de cheval et aux dents gâtées, celui dont les yeux m’ont appelée. Ceux-ci sont éteints désormais. Il contemple les dents de la fourchette, et son voisin fait de même. Un choc en le voyant. Je sais que ce n’est pas lui, et pourtant, quelque chose me dit que c’est Eddy. Il n’y a que lui pour froncer ainsi du nez de telle manière que les narines se gonflent et captent ce qu’il interroge. Personne ne regarde personne. Ce message était pour moi seule.
mercredi 4 septembre 2013
1171 : mardi 3 septembre 2013
La paroi s’efface sur la gauche : sur des tables rondes, le couvert est mis. Six chaises autour de chaque table. Certains sextets sont déjà formés, servis, et donnent de la fourchette. Il reste une table de libre et trois incomplètes. Un regard insistant m’aimante vers celle où il ne manque qu’un convive. Je m’assieds à côté d’une petite dame ronde dont les rides attestent qu’elle a beaucoup ri. Mais c’était jadis.
mardi 3 septembre 2013
1170 : lundi 2 septembre 2013
Nous sommes, elle et moi, silhouettes noires découpées sur le mur silencieux, à espérer un écho à son audace. Des pas glissent devant la porte que j’ouvre d’une main d’automate. Deux dos s’éloignent, nous nous regardons ; l’instant d’après nous sommes dans le couloir. Au sol, une ligne verte. Elle nous mène vers du bruit, des cliquetis. Derrière nous, une autre porte s’est ouverte sans un grincement et nous sommes suivies par deux ombres.
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De concert, on dirait : « Ah, la mode des fourrures par-dessus les bikinis... » Fond prêt pour la fresque bucolique…
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