D’ailleurs, la pluie… Une goutte sur mon nez… Je tends la main. Une goutte sur ma paume… Je ferme le poing. Une goutte sur un ongle, puis trois autres d’un coup qui la bouscule et la font perler, comme de la rosée. Le ciel gros se rapproche des toits. J’attendais un orage et c’est l’averse d’abord. L’électricité est dans ma tête, et mes cheveux vont se dresser, paratonnerres de mon intériorité.
vendredi 31 mai 2013
jeudi 30 mai 2013
1128 : mercredi 29 mai 2013
J’entends une sirène au hululement qui enfle. A ma montre, il est minuit vingt, le matin est encore loin. Au bout de la rue, j’hésite un instant entre la gauche et la droite, il faut se décider, les pompiers arrivent. J’entends le grincement des pneus et me décide pour le fleuve. Après cinq cents mètres, je n’ai croisé qu’un couple amoureux et titubant et j’arrive sur les rives des courants noirs et tumultueux. C’est un grondement sourd qui se souvient des pluies.
mercredi 29 mai 2013
1127 : mardi 28 mai 2013
Du trottoir d’en face, j’attends le camion rouge. Je me cache dans un renfoncement pour ne pas éveiller le soupçon. J’ai dit au téléphone qu’il ne semblait y avoir personne dans l’appartement concerné. Pour ne pas qu’un homme risque sa vie pour moi qui ai déjà sauvé la mienne. Sauvetage aux multiples dimensions : je me sauve aussi de la spirale de l’enfermement suivant laquelle je m’enfonçais dans un long tunnel à l’humeur sombre. Je me sauve aussi de la moisissure qui guettait mes doigts à transpirer sur un clavier muet. Je respire l’air du dehors. La fumée a une odeur de lilas.
mardi 28 mai 2013
1126 : lundi 27 mai 2013
Un enfant qui pense sera un adulte qui lit le Trésor de la langue française informatisé. Tout à fait assimilable… L'air de rien, la marque se fait connaître pour les bijoux qu'elle vend : les couleurs de la vie. Appétissant !
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Je suis devant la porte, du côté extérieur. Le portable à la main. Penser aux voisins… alors j’appelle, numéro des pompiers. J’appelle pour ne rien avoir à me reprocher. La fumée semble me pister, elle se faufile, noire et sournoise. Mais c’est trop tard, je suis déjà ailleurs. J’enfile mon pull bleu, une grande douceur. J’aurai bien prolongé cet instant par un carré de chocolat, mais celui-ci a sans doute déjà fondu dans la fournaise, dans le sucre devenu caramel avant de se carboniser, au milieu du maïs que j’imagine sauter en feu d’artifice de pop corn nature et sans apprêt.
samedi 25 mai 2013
1125 : vendredi 24 mai 2013
penser franchir. chien soumis le pas s'apprête. dévastation du porche. il manque le linteau en haut et en bas le seuil de pierre. d'un côté et de l'autre montants de bois brûlé mouillés de pluie noire. passer. vie d'une seule foulée.
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Je fais volte-face et, fonçant vers la chambre, j’attrape mon sac à dos, je pioche, sur le mode automate, deux-trois vêtements sur chaque étagère, j’enfile mes baskets. L’ordinateur ? Qu’il crève. Je le jetterai bien tout de suite dans les flammes, mais il faut que ça ait l’air d’un accident. D’ailleurs, c’est un accident.
vendredi 24 mai 2013
1124 : jeudi 23 mai 2013
Un instant, je défaille. Que faire, s’enfuir ou jouir ? Suffoquer ou sortir dans la nuit pour respirer… Des vapeurs acides montent du tapis en éruption qui boit les mots cramés. En son milieu, l’étagère dans un craquement se brise. Il est peut-être temps de partir. Mais soudain, un sursaut : dans le placard, là-bas, qui s’enflamme, le chocolat ! Abandonnant tout sens de la mesure, je me sens mue par une pulsion animale qui me jette dans l’escalade de l’incendie pour atteindre le meuble de cuisine. C’est une brûlure à la main qui m’éveille de cette hypnose gustative. Au feu !
jeudi 23 mai 2013
1123 : mercredi 22 mai 2013
Elle est sur le point… Je jette un journal sur le sol à l’endroit où goutte la cire… Enfin la bougie bascule. Et le journal s’enflamme, ainsi que très vite le carton de vieux papiers à côté. Je sens l’excitation me gagner. Je regarde autour de moi… les livres ! L’étagère est sur l’étagère d’en face, à l’abri pour le moment… il n’y a qu’à la faire basculer ! Dans un grand « bang », elle atterrit la tête sur les flammes. La fête peut commencer. Les livres prisonniers et sacrifiés se voient grignoter, le bois des étagères se consume en craquant, du papier consumé s’envole comme de minuscules papillons… ils se posent sur mes cheveux.
mercredi 22 mai 2013
1122 : mardi 21 mai 2013
J’attends et je regarde. Tombera, tombera pas… Insoutenable… Elle n’est pas loin de s’éteindre, petit résidu de cire, si elle veut qu’on se souvienne d’elle dans un grand brasier, elle a intérêt à se décider.
mardi 21 mai 2013
1121 : lundi 20 mai 2013
De poubelle en container, le passé s'esthétise au présent. Effets dissimulés du genièvre dans le café ? Pareil pour les émois féconds des algues bleues.
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Il y a quelque chose qui brûle. Je me lève d’un bond. Ca vient de la cuisine. Mon dieu, la bougie ! Un flash, je me vois la coincer entre un dictionnaire et ma pile de livres de recettes. Je ne me souviens pas... De ma pièce principale fuient des odeurs de plastique chaud et d’aigres bois. Me précipitant, je heurte le montant de ma porte du petit orteil, mais je n’y laisse pas un cri, je garde ma voix pour l’urgence… La cuisine n’est pas encore en feu. Juste le plan de travail où se contorsionnent les bouteilles vides d’eau minérale dans le méli-mélo des fonds de placard dérangés. Le rideau de ma fenêtre est en train de se consumer, mais sans flamme. La bougie a roulé, elle est prête à tomber, et là, se serait plus grave : des cartons et plus loin le canapé…
samedi 18 mai 2013
1120 : vendredi 17 mai 2013
casque qui explose j'assiste à l'accouchement d'une chose explicitement flamme d'homme.
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L’arbre s’ouvre et m’avale. Je me love en son creux. Ne pas se poser de question, glisser, sans savoir vers où, tomber peut-être loin de l’enfer qui brûlera dehors. Mes yeux se ferment en même temps que l’écorce. Prisonnière volontaire, me voilà qui fait corps avec le végétal, les racines à mes pieds me tirent vers un tunnel étrange fait d’humus et de champignons. Puis je glisse, me voilà comme dans une caverne, boyau triste, grotte humide au sol lisse, je glisse et me cogne la tête… et dans la demi-seconde qui précède le choc, j’entends le crépitement des flammes et l’arbre qui gémit.
vendredi 17 mai 2013
1119 : jeudi 16 mai 2013
Les fumeroles qui montent du sol n’alimentent pas le brouillard du matin : l’humidité s’est envolée, reste un mystère et une odeur âcre. Autour de l’arbre, l’air est chaud. Pourquoi suis-je redescendue ? Une fumée sans feu m’encercle, que faire ? Je tâte l’écorce, prête à saisir à nouveau la branche basse et échapper ainsi à l’étouffement quand quelque chose d’étrange m’arrache à l’inquiétude. Dans l’arbre, une fente, comme une fissure qui s’ouvre… tout mon bras peut s’y glisser, mon épaule. Et si je me cachais là ? Et si c’était un piège... ? Je devrais peut-être plutôt foncer en fermant les yeux, pour passer au-delà de l’incendie souterrain, et tracer ma route vers ailleurs. Mais l’arbre me retient ! Mes doigts sont aspirés vers un antre insoupçonné, dans les profondeurs du tronc centenaire. Je ne parviens pas à m’en dégager et je commence à suer, en tirant, tant de l’effort que de la chaleur qui s’accroît. Je parviens cependant à remarquer qu’au bout de ma main prisonnière, l’air est frais. Et qu’il glisse tel un courant. Il y a peut-être là une issue.
jeudi 16 mai 2013
1118 : mercredi 15 mai 2013
Je m’installe sur la dernière branche qui m’apparaît suffisamment solide pour supporter mon poids. Pas de village au loin, ni de forêt, seulement l’herbe, tapis vert jusqu’au bleu. Et pourtant, il y a autre chose. Vers l’ouest, par intermittence, mon œil est attiré par un reflet. Scintillement saccadé, comme un message en morse que je voudrais pouvoir déchiffrer. Il y a donc là-bas quelqu’un, j’en suis sûre, même si, d’ici, sa silhouette se fond dans le paysage. Mon attention se porte sur le moyen de rejoindre cet autre passager de l’infinie prairie. Il n’y a pas de ligne droite, mais je vois qu’en bifurquant vers la droite, je contourne un cul de sac et pourrai continuer dans la bonne direction. Je veux partir avant que cet alter ego ne reprenne son chemin et ne cesse ses signes. Je redescends prestement, accrochant au passage une branche qui craque, ce qui manque de me faire choir. Je suis enfin à terre quand une odeur m’alerte : ce n’est pas celle de la terre du matin, l’air sent le danger.
mercredi 15 mai 2013
1117 : mardi 14 mai 2013
Mes doigts bientôt pourront toucher le faîte et les dernières feuilles au vent. Oui, enfin, je vais pouvoir contempler la plaine plus loin que l’horizon du promeneur en errance. Je ne crains plus les vers ni les serpents et je deviens oiseau ; ici, je ferai mon nid. Mon regard se porte vers le soleil qui monte sans encore m’éblouir. Il y a dans le ciel comme une brume montante qui marque des chemins au-dessus de l’herbage : je vais aussi bientôt voir quels sont les couloirs qui ne mènent à aucune impasse.
mardi 14 mai 2013
1116 : lundi 13 mai 2013
L'énergie du soleil commence à s'épuiser : les horloges, la fondue et le chocolat ne font plus recette ; quel dommage sous les pavés, les racines. Mais parfois, on l'empêche de battre.
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purification des mots prononcés dans le feu. crémation mesurée cendre noire intelligible. souffle au travail.
Un courant d’air sur mon front me pousse à me lever pour chercher la lumière. Je m’adosse au tronc large. Pas de fruit dans cet arbre, mais des branches assez basses pour être attrapées. Ma main en saisit une, j’y ajoute l’autre en regard et me voilà me balançant afin d’y envoyer mes pieds. Ca y est. Je me hisse. La suite de l’ascension est moins acrobatique, il suffit de gravir l’échelle végétale qui m’est présentée : l’arbre est accueillant comme une chaumière.
lundi 13 mai 2013
1115 : dimanche 12 mai 2013
comme un savoir dans l'oxydation de métal de nuit friable. mastication de la douleur. mesure maxillaire d'un portail de camp.
samedi 11 mai 2013
1114 : vendredi 10 mai 2013
J’ouvre un œil. De la terre colle à mes cils. Je me retourne sur le dos. L’arbre. Il est immense, majestueux, les bras tendus jusqu’aux nuages absents. Il a veillé sur mon sommeil. Combien d’heures ? Le soleil n’est encore pas bien haut. J’ai l’impression d’avoir rêvé sans pouvoir me souvenir de quoi. Juste une sensation, celle d’avoir cherché, cherché, comme je cherche ici mon chemin. L’ai-je trouvé dans mes songes ?
vendredi 10 mai 2013
1113 : jeudi 9 mai 2013
erreur d'herbes sur la terre asservie. terre noircie test noir pressenti entre les tiges dures. séjour d'un seul tenant. partout le vide jouxte le vide.
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L’ordinateur est encore allumé. Je rouvre une énième fois toutes mes fenêtres sur le monde extérieur et sa société virtuelle : quelques vidéos en promotion, je regarde celle qui nous promet le retour d’un comique des années 80 mais ça ne me fait pas rire. Suis-je devenue sèche ou le type n’est pas drôle ? De liens en liens, j’arrive à un documentaire sur le paléolithique. Une histoire d’erreur d’interprétations sur le passé d’un corps momifié, tournée comme une enquête policière. Je me prends au jeu en grignotant un paquet de spéculos.
jeudi 9 mai 2013
1112 : mercredi 8 mai 2013
L’ordinateur est encore allumé. Je rouvre une énième fois toutes mes fenêtres sur le monde extérieur et sa société virtuelle : quelques vidéos en promotion, je regarde celle qui nous promet le retour d’un comique des années 80 mais ça ne me fait pas rire. Suis-je devenue sèche ou le type n’est pas drôle ? De liens en liens, j’arrive à un documentaire sur le paléolithique. Une histoire d’erreur d’interprétations sur le passé d’un corps momifié, tournée comme une enquête policière. Je me prends au jeu en grignotant un paquet de spéculos.
mercredi 8 mai 2013
1111 : mardi 7 mai 2013
L’humeur morne, je glisse sur le parquet jusqu’à la porte que je claque. J’ai faim. Le soir est bientôt là. Je vais me faire un goûter dînatoire de consolation. En entrée de la crème glacée, pour ouvrir l’appétit. Les morceaux de caramel explosent mes papilles en manque et me réconfortent déjà un peu. Ensuite vient le croustillant : des chips de pancetta revenue à la poêle. Mangés avec les doigts, gras que je lèche. Délicieux. Il reste aussi quelques olives noires, ça fait un apéro au milieu de repas. Ca s’enchaîne divinement avec un vieux reste de fromage de chèvre, on se croirait en Crète ou près de l’Olympe. Et comme dessert ? Allons, à nouveau un peu de crème glacée et la boucle est bouclée : j’aime la narration en forme de spirale.
mardi 7 mai 2013
1110 : lundi 6 mai 2013
Un panier à "salades", les emballages de semoule de blé dur... Quand la table est ronde, les pensées circulent sans se heurter. Dans le même ordre d'idées, le moteur à hydrogène entraînera-t-il une polémique entre l'air et l'eau ?
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Un glissement sous ma main, ah ! La bête n’était pas morte. Je me propulse vers le lit, en dessous duquel elle s’est réfugiée. Derrière des moutons de poussière qui oscillent à mon souffle, il y a, tout au fond, un petit cœur qui bat, sans doute très vite, et je vois enfin… je vois deux yeux. Deux yeux d’un vert phosphorescent, surnaturel. Ils me fixent avec une intensité que je sens électrique, ils pourraient me foudroyer s’ils étaient plus proches. Je ne ressens ni sa peur, ni la mienne, et la curiosité me pousse à étendre le bras pour essayer de toucher la créature. Alors celle-ci se met à siffler, un cri aigu, et fond sur ma main. Une décharge fulgurante, je me jette en arrière, du sang coule de ma paume. Et je peux enfin apercevoir l’animal en fuite une sorte de rongeur-serpent très long, vert de gris, qui slalome entre mes mouchoirs en papier jusqu’à la faille dans le mur. Disparu. Toujours là.
lundi 6 mai 2013
1109 : dimanche 5 mai 2013
les yeux planant au-dessus des eaux. le sel du monde régurgité. assises du monde son marécage pur.
samedi 4 mai 2013
1108 : vendredi 3 mai 2013
Je passe dans ma chambre, enjambe des vêtements en vrac et colorés. Je déplace la commode. Elle est lourde et ses pieds laissent une trace sur le sol. Derrière, ce que je craignais : la plinthe est percée d’un trou par lequel ma bête-mystère peut se glisser. J’y enfonce l’index, tant pis si je me fais mordre ou trancher le doigt, il faut que je sache. Rien ne vient me blesser. Soudain, j’entends bouger le monstre d’habits qui se tient derrière moi. Un frôlement de tissus puis une déchirure. Alors je saute à pieds joints sur le tas, je le piétine, rebondis et recommence de plus belle. Un silence, une respiration, plus rien ne bouge, je m’attends à voir du sang suinter de ma colline. Mais rien. Alors je redescends sur le plancher et j’ôte, un à un, les tee shirts et culottes. Je vais enfin voir à quoi ressemble le cadavre.
vendredi 3 mai 2013
1107 : jeudi 2 mai 2013
Je vide un à un tous mes placards pour sonder
le mur, entendre s’il sonne creux. Je tapote avec un manche de couteau derrière
les cloisons démontées. Sur le sol de la cuisine s’amoncellent les boîtes de
conserve, paquets de pâtes, sachets de riz, verres de toutes tailles, assiettes
idem. Je n’ai qu’à me laisser tomber en arrière pour m’asseoir sur ce que je
mangerai ce soir. Évitons le pack de soupe, ça risquerait d’être un coussin
gicleur. Il me semble que la cloison résonne clair jusqu’au mur de séparation
avec ma chambre. Super. Le rongeur peut m’entendre ronfler et ce moquer
nuitamment de moi.
jeudi 2 mai 2013
1106 : mercredi 1er mai 2013
arrêt aux portes du trouble. nuit crevée.
trou facial cercle d'ombre dans le vide extérieur. brûlure aux yeux
reconstitution de l'incendie. escarbille d'un feu prescrit. crémation froide.
dévastation de la nuit palpébrale.
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