Tu mérites de la beauté. On peut toujours espérer  que la beauté console, qu'elle console mal mais qu'elle console. Je ne  t'ai pas consolée, n'en avais-je pas le pouvoir sûrement, du moins je  n'ai pas su le faire. C'est ce qu'il me reste pour te consoler,  t'adresser de la beauté, et je ne peux exclure que ce soit moins aisé,  plus vain, que boire la mer entière. Tu ne me le demandes pas, pas du  tout, mais l'on dit bien que c'est vouloir donner à quelqu'un qui n'en  veut pas quelque chose que l'on n'a pas. C'est insensé, c'est un échec  assuré, c'est hors de propos, ce n'est pas la question. Ce serait ma  façon d'essayer d'être à la hauteur de ce dont tu m'as un temps cru  capable, l'intelligence, la finesse, l'admirabilité. Ce serait un échec  d'après mon échec précédent, un échec que je pourrais réussir,  c'est-à-dire un échec auquel je pourrais échouer. Tu mérites de la  beauté, de ceci je ne doute pas.
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La  route défile sous la roue avant du vélo. Des gravillons. Bordée, mais  bientôt débordée par une verdure luxuriante, échevelée, de feuilles, de  ronces, d’orties, qui dans la chaleur de l’été, exhalent une fraîcheur  inattendue. Au dessus, la frondaison des arbres emplit le ciel. Au loin,  des pâturages d’herbe haute et des haies d’arbrisseaux dont le  feuillage allumé de soleil contraste avec l’ombre reposante des troncs  alignés. Les mouches se déchaînent, bourdonnantes, mais les oiseaux  filent à travers l’air chaud sans un cri. Le vélo lambine dans  le vide du mois d’août.
