dimanche 16 janvier 2011

429 : samedi 15 janvier 2010

Bien que le mutisme du réel lui donnât parfois le vertige, Léon n’était pas du genre à se raconter des histoires.

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Je m‘assois où je veux c’est ça ? Vous êtes sûr que vous n’avez pas de préférence ? Alors, à quoi dois-je m’attendre ? A un jeu de questions réponses ou à un exercice de psychanalyse où je parle dans le vide tandis que vous préparez vos listes de courses, tout en faisant semblant de m’écouter ? Autant que je vous prévienne, si c’est ça on ne risque pas d’aller loin. J’ai une dent contre Freud. Pourquoi ? Tiens, une question. Parce que ses postulats enlèvent toute liberté aux hommes. A partir du moment où l’on n’accepte pas ses théories, sans doute forgées pour excuser ses propres pulsions, c’est qu’on refoule et que l’on est encore plus atteint que les autres. Rien que cela suffit à exclure Freud de mes étagères. Quant à Jung... Non, ne parlons pas de Jung... Ceci dit, je n’ai rien contre le fait de consulter, si c’est constructif. Vous avez dû recevoir ma mère et mes sœurs n’est-ce pas ? Non, pas ma mère, bien sûr. Mais vous étiez son thérapeute. Avant sa mort. Si mes sœurs viennent, je vous plains. Après toutes ces années, ce qu’il me reste de mon enfance, c’est l’impression d’avoir grandi dans une volière de féministe. N’importe quel homme sain d’esprit aurait voué sa vie au célibat après ça, mais j’ai eu de la chance. Mon père vient vous voir aussi ? Vous n’avez pas le droit de me le dire ? Oh, de toutes façons, je sais bien ce qu’il vous dirait. Bon. Vous avez des questions ? Ou bien je continue à parler dans le vide, ce qui commence à m'agacer sérieusement ? Et ça coûte combien tout ça déjà ?