Si la guillotine a été mise au point pour des raisons morales et pratiques, car elle permettait une exécution rapide, sans échec possible ou presque et sans douleur ou presque pour le condamné, l'appareil a aussi spécifiquement pris la valeur de forme symbolique et esthétique de la Révolution Française. Il a même en tant que forme symbolique et esthétique pris la fonction d'opérateur historique. La guillotine coupe net, elle exécute irrévocablement, elle est elle-même le mouvement de l'Histoire. Avec la chute du couperet, c'est la République et l'Histoire elles-mêmes qui tranchent, comme une instance supérieure tranche à jamais une question que des prédécesseurs empêtrés n'avaient pas su démêler. C'est l'instrument de l'Histoire comme violons et trompettes sont instruments de musique, comme clous et couronne d'épines sont instruments de la Passion. La Révolution Française n'usa qu'exceptionnellement d'autres moyens pour mettre à mort, dans des situations d'impossibilité pratique de recourir à la guillotine, lorsque le rendement nécessaire contraignait à la canonnade. Au cours d'un événement que je ne sais hélas plus dater ni situer, je crois sous Thermidor, ont dut abattre par balles des condamnés insurgés ; ensuite on décapita leur cadavre.
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Le Voyage de Jean-Guy (2/7) Jean-Guy, en revanche, l'avait souvent mauvaise et ne souriait jamais après les grands soirs de spectacle. Il ne buvait qu'un seul verre de rosé par politesse, nous félicitait sans chaleur puis repartait au bras de sa femme, en silence, jusqu'à la représentation suivante. Il faut dire que les rôles de notaire, de directeur d'hôtel, de messager dépêché expressément de Paris, c'était à chaque fois pour sa pomme. Mais tout déçu qu'il soit lors de la distribution des rôles en début de saison, Jean-Guy continuait malgré tout chaque année d'apprendre et de travailler son texte avec un sérieux qui forçait le respect de toute la troupe. D'ailleurs, c'est sans doute pour cette raison, à cause de cet air studieux et appliqué qu'il affectait sur scène comme dans la vie, qu'il récupérait systématiquement les troisièmes rôles un peu mornes. L'expression grave qu'il prenait pour prononcer les banalités les plus consternantes donnait même parfois un tour comique insoupçonné aux répliques de ses personnages. Jean-Guy, pour qui la valeur et la puissance comique d'un rôle tenaient avant tout au temps passé sur scène, n'exploita jamais cette faculté consciemment. Ce don naturel pour l'humour pince-sans-rire resta ignoré de lui, et demeura donc parfaitement intact, jusqu'à la fin de sa vie.