La nuit dernière, vu documentaire sur la Suisse pendant mon insomnie: poésie des lacs, charme des cascades, effet gigantesque des glaciers, pins d’une grandeur incroyable posés en travers des torrents, cabanes suspendues sur des précipices (se renseigner dans une agence pour les prochaines vacances d’hiver).
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C’était n’avoir rien prévu d’avance pour ce jour de démonstration client, empilement d’évènements vains qui avaient repoussé la préparation de la seule tâche utile de la semaine. Se préparer à jouer, à paraître, à souffler le vent habituellement réservé aux ennemis d’étages, détester ceux-là, se détester soi, détester le client et gâcher encore, en mouvements d’humeur, ce qui restait de temps. Hausser, intérieurement, des épaules bien surchargées.
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A chaque fois c’était pareil. Elle lui disait 20h30, prévoyait qu’il aurait au moins un quart d’heure de retard, se laissait parfois encore cinq à dix minutes de marge, mais attendait toujours au moins encore une demie heure qu’il la rejoigne. Il ne faisait pas exprès. Il était confus, n’avait même pas d’excuse. Simplement il n’avait pas vu l’heure passer, il n’osait pas quitter son précédent rendez-vous, interrompre son interlocuteur, on lui avait proposé un dernier verre et il avait croisé un type incroyable qu’il n’avait pas revu depuis des années. Elle comprenait bien tout ça, pas de problème. Mais elle ne savait pas quoi faire de tout ce temps perdu pour elle, sous la pluie, dans le froid, avec des gens qui lui jetaient des regards louches après l’avoir croisé deux ou trois fois au pied de leur immeuble. Parfois elle avait été à bout de patience et avait préféré rentrer seule, retrouver seule les amis qui les attendaient également, voir seule le film programmé, écouter seule le concert réservé six mois plutôt. Elle avait refusé de décrocher son téléphone pendant des jours. En 1999, elle était partie seule en vacances. Mais un matin il était là, ou bien un soir où elle ne l’attendait pas, et il n’y avait rien à faire. Il n’avait rien de spécial à dire. Ils se retrouvaient. Il occupait tout l'espace en restant attentif au moindre de ses désirs. Elle ne s’habitua jamais vraiment à ces retards, ne put jamais lui faire une totale confiance, refusa l’enfant qu’il espérait, mais ne le quitta jamais et ne fut pas malheureuse.
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L'homme passe sur le pont un peu plus loin du bois, juste après un virage entre les arbres. La passerelle est interdite mais rien ne l'indique, et d'ailleurs Hector sait-il ? Il la tente d'un pas lent et s'étonne de ne pas avoir vu arriver la masse charbonneuse de nuages qui pèse sur le paysage. Quelques points brillants clignotent à la surface de l'eau boueuse. Un moment d’arrêt sous une futaie de feuilles sèches. Les graviers s'entrechoquent malgré leur lit de boue, ce n'est que l'horizon qui attire son regard. C'est presque étouffant, toutes ces rameaux qui brouillent la grisaille du dessus. Des arbres aux troncs emprisonnés de lianes, lignes enchevêtrées. Jeux foutraques des branchages, chacune s'étire dans un axe équidistant des autres. Il a l'impression de ne pas faire partie du paysage. Quelques boules de gui au sommet des grands arbres, les feuillages qui embrouillent tout quand le vent se lève et que tout se soulève. Il remarque au passage le jeu des branches entraînées simultanément dans un mouvement de balancier, son pas accélère. Apparition de la cascade au prochain détour, elle s'étale et devient rivière. En contre-bas les brindilles surnagent sur le flux sombre où se réverbèrent des cumulus. Gouttelettes d'en haut reflétées dans leur prochain état liquide; rivière contemplant de dessous son possible devenir vaporeux qui flottera au gré des vents d'altitude. Quelle matière d'eau a raison ? Les ondes entraînent des branchages jusqu'aux talus. Le soleil resurgit, noircissant d'un coup les rythmes biscornus des branches en contre-jour. Hector continue à longer le ruisseau qui se ramenuise avant de s'évanouir sous un talus. Encore un peu plus loin, le chemin fait un virage.
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Valentine se dévide de ses mots sans pudeur ni retenue. Elle fait jaillir d'elle ses colères, ses envies, ses désespoirs, ses joies tues et ses bonheurs aussi. Après toute une vie de silence contraint, ces instants sont une délivrance. Elle n'a aucun objectif de cohérence, c'est impossible, ses phrases se bousculent, se mélangent, son cerveau et sa bouche ne pensent pas en même temps.