samedi 16 octobre 2010

338 : vendredi 15 octobre 2010

Lettre d’amour à une inconnue (1/18) Rédiger un message à : Noémie Adorina / Objet : C’est idiot et troublant. / Message : Mon regard est tombé sur vous au hasard d’un album et s’est arrêté pour la première fois en ce lieu où il a déjà dû croiser, sans prendre garde, des milliers de visages éparpillés entre les mailles du réseau. J’ai d’abord cru en vous voyant reconnaître ma silhouette. Je n’avais pourtant rien à faire dans le contexte au sein duquel vous sembliez jouer le rôle de victime photographique consentante. Comme je ne suis pas vraiment folle, ni schizophrène, j’ai vite compris qu’il ne s’agissait pas de moi.


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La partie de scrabble, rien qu'à deux personnes, avait pitoyablement commencé avec le mot de trois lettres "but" centré horizontalement sur l'étoile, et s'acheva sur un score extrêmement serré avec le mot compte triple zygomatique. Cependant il fut impossible de parvenir à déterminer le vainqueur en raison de l'emploi en milieu de partie d'un mot composé (porte-manteau), fait qui fut contesté, le tiret ne figurant évidemment pas dans l'alphabet... Il est vrai qu'on ne joue jamais seul aux jeux de société, sauf au mikado peut-être enfin il doit s'agir d'une exception, car jouer seul ne veut rien dire, même aux dominos. Celui qui joue seul aux cartes pourra faire une réussite, juste histoire passer le temps.


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Des groupes se déplacent et nous ne savons pas où il vont ni d’où ils viennent, comme si le mouvement était leur seule origine et leur unique destination. Pourtant, leurs épaules et leurs esprits portent le poids de frustration, d’impatience, de malaise et de contrariété qui pèse sur les êtres séparés d’un but dont la nature ou du moins l’existence aurait été formulée en pensées ou exprimée en sentiments. Ils se déplacent à plusieurs et nous les voyons un instant, alors que la durée de leur voyage et la certitude qu’il sera sans fin se sont lentement insinuées en eux, ont rendu leurs paroles rares et leurs vies centenaires.


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C’était se demander ce qui se passait ailleurs, loin des écrans où la situation « s’améliorait » seulement deux jours auparavant, et aujourd’hui tabassait des lycéens, crevait des yeux (encore) mais au café, ou à midi, ne plus parler de ça, parler du week-end à venir, du beau temps dont on avait bénéficié, déjà bien longtemps pour l’époque, s’estimer heureux de ça et puis, vers la fin du repas, blaguer quand même au sujet du tournant raffiné que prenaient ces grèves, et ne rien dire de plus, en attendant, peut-être, plus.