Tout en haut du peuplier, qui se mourrait lentement depuis qu’une partie des eaux du ruisseau avait été captée, la pie célébrait un dieu, son dieu. L’arbre l’aidait autant qu’il pouvait à porter au loin le chant vif et pourtant rauque comme les pierres que le Barret perdait de temps à autre, au goutte à goutte ou en larges éboulis dévoreurs de sentiers, de prairies, parfois même de maisons le plus souvent inhabitées. De son rocher, face à la montagne, Tamel écoutait les désirs minéraux et devait sans cesse résister à celui de plonger lui-même vers les promesses obscures et denses de torrent dans le lit à sec.
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Il a saisi la main tendue et l’a gardée dans la sienne longtemps, les yeux fermés. Son visage trahissait le désordre de ses pensées. Sa tête oscillait doucement, ses doigts frémissaient comme s’ils découvraient tous les méandres d’une vie secrète. L’autre ne bougeait pas, attentif à la pression de cet homme qu’il ne connaissait pas. Puis il en eut assez et se dégagea brutalement. L’homme ouvrit les yeux : il pleurait. L’autre le dévisagea un instant, incrédule, hésitant à prononcer les seuls mots qui lui venaient à l’esprit. Ce visage lui rappelait quelqu’un, un souvenir enfoui, une sensation douloureuse, une absence, oui, une absence cruelle, insoutenable. L’homme tourna les talons et s’enfuit. L’autre suivit sa silhouette tout en se demandant s’il n’avait pas rêvé. Ce pas dansant, cette manière d’effleurer le sol, comme s’il y avait un danger à y poser ses pieds, le balancement des bras, le frottement des mains sur les vêtements, tout cela évoquait une curieuse impression, faisait resurgir en lui la réminiscence d’un ébranlement profond. Il comprit soudain qu’il venait de retrouver son père.