mercredi 7 avril 2010

146 : mardi 6 avril 2010

La neige tombait toujours après qu'ils les avaient toutes les trois abattues, et très vite leur enveloppe textile noire fut recouverte sous la blancheur aveugle. J'étais au bord du chemin forestier, assis dans l'ombre lourde que font comme piège et abri les sapins. Mes trois guides trépassés allaient emprunter le chemin lorsqu'ils furent tués sous mes yeux, pour mes yeux, ce en quoi je connaissais les directions de mes deux alternatives. Me rendre seul où je devais et poursuivre, ou repartir en sens inverse d'où je venais. Deux risques de se perdre. Avait-on abattu mes guides pour me tuer, estimant qu'il était certain que je mourrais rapidement dans la neige, ou pour m'avertir que poursuivre plus avant serait ma mort, ou pour me rendre messager, pour que je revienne d'où je venais et y dise ce que j'avais vu ? Le désert et la monotonie enneigée de ces contrées du nord n'offraient pas plus de repères que d'espoir de trouver sa destination, quelle que soit celle que je choisisse. Ma mort était probable, elle serait certainement solitaire, prochaine, glacée et noyée de faim, je m'imaginai ravagé de faiblesse m'abandonnant dans la neige au sommeil pour en finir quand mon corps n'avancerait plus. Je continuerai vers le sud, si quelque possibilité de ne pas périr m'était comme miraculeusement accessible, autant qu'elle me voie arrivé au véritable but de mon voyage, les balles qui peut-être me seraient réservées plus loin ne noircissait qu'à peine ma situation quasiment désespérée.