Il
n’y a pas de fenêtre. Quelle heure peut-il être ? Dans ma tête, l’absence
d’un tic tac aspire mes repères. Je ne sais ni combien de temps j’ai dormi, ni
si je suis à nouveau éveillée depuis quelques minutes ou si ce sont des heures.
La question étant en soi anodine, j’ose à haute voix : « tu aurais
l’heure, par hasard ? » Elle me répond : « je n’ai pas
l’heure ; et il n’y a pas de hasard. »
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| Il me faut | 2 | Dans ce rêve, il me faut la parole, l’ancienne parole,
les mots que l’on se chuchotait amoureux hors et à l'abri des querelles
domestiques, affaires jalouses ou autres invectives aggravées de
reproches. Il me faut les secrets que l’on garde pour le Deux, les
batailles philosophiques pour séduire et grandir, les spectacles à
partager, la curiosité intarissable de savoir l’autre. «
L'amour, après tout, n'est qu'une curiosité supérieure, un appétit de
l'inconnu qui vous pousse dans l'orage, poitrine ouverte et tête en
avant. » Il me faut l’inconnu entre nous, non pas l’âme et ses
indispositions ou son indisponibilité, de l’Italie entre nous,
peut-être, ce qu’on dit de la dolce vita et ce qu’on en vit. Il me faut
le très doux, les parfums arrosés de rosé, le vin qui coule et les
gouttes qui échappent à la bouche pour prendre la peau, la douceur des
épidermes nouvellement en collision, l’échappée du savoir, la dérive des
sentiments, des gougères à fourrer, le désir si tant est que ce dernier
suffise, l’abolition des guerres, le répit dans l’étouffe de la vie,
l’avenir murmuré dans le cou.