Un chat. Un chat obèse. Il regarde la trapéziste. Accrochée au grand arbre de la cour. Elle tient d’une jambe sur le rondin clair. La tête en bas, cheveux au vent, elle rêve. Dans le balancement insistant, elle rêve qu’elle est oiseau. Libre. Elle rêve ses mains couvertes de plumes. Doux plumage. Elle n’a plus de nom ni de poids. Ni de compte bancaire à découvert. Le va-et-vient s’accentue dans la brise. Si seulement l’air si pur en haut des branches se figeait… Le trapèze y garderait une pose oblique. Suspense… Elle glisserait. Elle serait bien obligée de s’envoler. Le barbu invisible est de bonne humeur ce soir. Il pourrait exaucer. Exaucer quoi ? Un rêve, une chimère, un caprice de petite fille triste ? Pourrait. Le fera-t-il, enfin ? Le souffle divin devient puissant. Il hésite puis se donne et emporte les feuilles. Tourbillon. Et la trapéziste ouvre les bras. Elle se sent partir et ses membres supérieurs se transformer. Des ailes, peut-être… C’est un délice. Sentir que le vent vous soutient. Blonde enfant minuscule taillée comme une hirondelle, vole ! Mais Dieu n’existe pas, ni la magie, elle tombe. Le chat n’attendait que cela. Miam.